ISLAM (La religion musulmane) Les sciences religieuses traditionnelles
La grammaire
C'est du double besoin de fixer le texte du Coran et d'en enseigner la langue aux étrangers convertis qu'est née la grammaire arabe. De même que les autres sciences islamiques, comme l'exégèse, la théologie et le droit, la grammaire s'est constituée, durant la première moitié du viiie siècle, dans les deux métropoles du sud de l'Irak : Baṣra et Kūfa. Dans ces deux grands centres intellectuels, en dehors de toute influence étrangère, se développèrent en effet deux écoles grammaticales, chacune ayant sa méthode pour décrire, analyser et classer les faits grammaticaux. À la fin du viiie siècle, la grammaire se trouve ainsi codifiée dans deux ouvrages : le Kitāb fī l-naḥw du Baṣrien Sībawayhi (mort en 793) et le Kitāb al-Ḥudūd du Kūfien al-Farrā' (mort en 822). De ces deux ouvrages fondamentaux, seul le Kitāb de Sībawayhi nous est parvenu.
Naissance et développement
Au milieu du ixe siècle, lorsque al-Mubarrad (mort en 898) arrive à Bạgdād, c'est la méthode de Kūfa que les disciples d'al-Farrā' y enseignent. Mais, grâce à la clarté de son enseignement et à son traité dans lequel il condense toute la matière du Kitāb de Sībawayhi, al-Mubarrad impose la méthode de Baṣra dans la capitale. Dans un premier temps, les grammairiens de Bạgdād mélangent les deux méthodes, puis abandonnent petit à petit la méthode de Kūfa pour celle de Baṣra. Ibn al-Sarrāǧ (mort en 928) assure le triomphe définitif de la méthode de Baṣra en introduisant les divisions de la logique aristotélicienne dans son livre sur les fondements de la grammaire.
Le xe siècle est vraiment l'âge d'or des études grammaticales à Bạgdād où enseignent trois grammairiens mu‘tazilites : al-Sīrāfī (mort en 979), al-Fārisī (mort en 987) et al-Rummānī (mort en 994), puis leur élève Ibn Ǧinnī (mort en 1002). Par leurs commentaires sur le Kitāb de Sībawayhi, leurs sommes sur les fondements de la grammaire et leurs manuels pour l'enseigner, ces savants achèvent la rationalisation de la grammaire, dont ils font une construction logique, fondée sur la notion de norme.
Après une pause d'un siècle dans les études grammaticales, le Persan al-Zamaẖšarī (mort en 1144) compose un traité didactique concis et clair, qui sera commenté par l'Alépin Ibn Ya‘īš (mort en 1245), tandis que l'Irakien Ibn al-Anbārī (mort en 1181) présente, dans l'un de ses ouvrages, cent vingt et une questions qui ont fait l'objet de divergences entre les grammairiens de Baṣra et ceux de Kūfa, en donnant les arguments des uns et des autres.
Au xiiie siècle, l'Égyptien Ibn al-Ḥāǧib (mort en 1249) abrège le traité d'al-Zamaẖšarī dans deux opuscules qui seront commentés par le Persan al-Astarābāḏī (mort en 1289) et, à la même époque, le Syrien Ibn Mālik (mort en 1273) condense toute la grammaire dans un poème de mille vers.
Enfin, au xive siècle, l'Égyptien Ibn Hišām est l'auteur de plusieurs traités didactiques, dont il commente lui-même certains.
Tels sont les principaux grammairiens qui ont développé et approfondi une réflexion originale sur le système grammatical que Sībawayhi avait exposé dans son Kītab, et auquel ils n'ont apporté que peu de changements. Comme le montre l'analyse qui suit, ce système diffère profondément du système grammatical gréco-latin.
Les trois parties du discours
Les grammairiens arabes ont reconnu dans leur langue trois sortes de mots : le nom, l'opération et la particule.
– Le nom est le mot qui s'applique à la chose et s'identifie à elle ; le nom ne signifie donc pas la chose, il est cette chose. C'est sous l'influence de la logique aristotélicienne que les grammairiens, à partir d'Ibn al-Sarrāǧ, distingueront le nom signifiant et la chose signifiée. Les noms sont de deux sortes : le nom complet[...]
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Écrit par
- Chafik CHEHATA : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Paris
- Roger DELADRIÈRE : professeur honoraire à l'université de Lyon-III, ancien directeur de recherche pour les études arabes et islamiques
- Daniel GIMARET : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section, sciences religieuses)
- Guy MONNOT : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section, sciences religieuses)
- Gérard TROUPEAU : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (IVe section)
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