ISLAM (La religion musulmane) Les sciences religieuses traditionnelles
La mystique
En l'an 632, lors du Pèlerinage d'adieu et trois mois avant sa mort, le Prophète Muḥammad s'adressait à la foule des musulmans et leur demandait : « Ai-je bien transmis mon message ? », et avant de les quitter il leur donnait cette ultime recommandation : « Que celui d'entre vous qui est témoin informe celui qui est absent ! » Le double message de l'islam, à la fois loi (sharī‘a) et vérité spirituelle (ḥaqīqa), Coran, parole de Dieu révélée « en langue arabe claire », et sunna, tradition du Prophète constituée de ses propos et de ses actes, était ainsi confié aux croyants, qui avaient pour devoir de le communiquer.
L'islam et l'obligation de l'instruction spirituelle
Selon une autre parole fondamentale de Muḥammad : « La recherche du savoir est une obligation pour tout musulman. » Ce hadīth est revendiqué par tous les « savants », et plus particulièrement par ceux qui sont éminemment « les héritiers » du Prophète, et dont la fonction est d'enseigner « la science des cœurs » (‘ilm al-qulūb), « la science de la gnose » (‘ilm al-ma‘rifa), ou encore « la science de la vie spirituelle », le soufisme (‘ilm al-taṣawwuf). Cela implique que celui qui « aspire à Dieu » (murīd) a besoin d'un maître ( cheikh), sans lequel, livré à l'ignorance, il risquerait de s'égarer gravement. ‘Abd al-Qādir al- Jīlānī, le grand saint de Bagdad (mort en 1166), écrit à ce sujet dans sa ̣Gunya (ii, pp. 184-185) : « Dieu a été l'instructeur direct d'Adam, puis après sa chute ce fut Gabriel qui s'est chargé de son enseignement [...]. Ce fut également Gabriel qui a instruit Muḥammad et qui lui a appris notamment comment pratiquer les ablutions (wuḍū‘) et les gestes de la prière rituelle (ṣalāt) [...]. Muḥammad a instruit ses compagnons (ṣaḥāba), et à leur tour ceux-ci ont instruit les musulmans de la deuxième génération (tābi‘ūn), et ainsi de suite [...]. Les cheikhs, quant à eux, sont le chemin qui mène à Dieu, les guides qui conduisent à Lui, et la porte par laquelle on pénètre jusqu'à Lui [...]. Le murīd ne doit pas se séparer de son cheikh tant qu'il n'est pas parvenu à son Seigneur, qui se chargera alors de l'éduquer et de le former. »
La sainteté, « amitié divine » (« walāya ») et « proximité de Dieu » (« qurba »)
Selon la dernière phrase de la citation précédente, le rôle du maître spirituel s'arrête là où commence celui de Dieu à l'égard des êtres d'exception, c'est-à-dire les saints. Le mot qui les désigne habituellement est celui de walī (awliyā‘ au pluriel). Des versets coraniques (x, 62-64), souvent cités, attestent que : « Les amis de Dieu n'éprouveront plus aucune crainte ni aucune affliction, eux qui auront cru et auront fait preuve de piété. Ils auront reçu la bonne nouvelle dans la vie immédiate... » La racine wly, à laquelle appartiennent le mot walī et le mot walāya, la « sainteté », contient les deux idées d'amitié et de proximité ; les saints du rang le plus élevé seront donc également désignés dans le Coran par le terme al-muqarrabūn (lvi, 11), « ceux qui sont rapprochés », et qui « devancent » (al-sābiqūn) les autres croyants.
Ces deux notions d'amitié divine et de proximité de Dieu se retrouvent dans un célèbre hadīth qudsī (où Dieu parle à la première personne), consigné dans les recueils canoniques de traditions : « Quiconque manifeste de l'hostilité envers l'un de Mes amis, Je lui déclare la guerre. Mon serviteur ne se rapproche pas de Moi par quelque chose qui Me soit plus agréable que l'accomplissement de ce que Je lui ai prescrit, et Mon serviteur ne cesse de se rapprocher de Moi par des œuvres surérogatoires, jusqu'à ce que Je l'aime. Et, quand[...]
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Écrit par
- Chafik CHEHATA : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Paris
- Roger DELADRIÈRE : professeur honoraire à l'université de Lyon-III, ancien directeur de recherche pour les études arabes et islamiques
- Daniel GIMARET : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section, sciences religieuses)
- Guy MONNOT : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section, sciences religieuses)
- Gérard TROUPEAU : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (IVe section)
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