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ITALIE Le cinéma

Le néo-réalisme et les années d'après guerre (1945-1959)

Préparé par une réflexion théorique et par une expérience pratique, le néo-réalisme donne ses premières œuvres en 1945 avec Giorni di gloria (Jours de gloire), film documentaire coordonné par Mario Serandrei (1907-1966) et Giuseppe De Santis (1917-1997), auquel prennent part Luchino Visconti et Marcello Pagliero, et Roma città aperta (Rome ville ouverte) de Roberto Rossellini, véritable acte de naissance du mouvement. Le courant se développe très rapidement : après le caractère intemporel des films aseptisés des années 1930, les cinéastes de l'après-guerre veulent porter un témoignage sur le moment présent et le proche passé, sur la guerre qui a ravagé le pays et sur les difficultés de la reconstruction. Ce mouvement novateur, qui constitue la ligne de crête de tout le cinéma italien, véritable point de référence pour tout ce qui s'est fait avant et pierre de touche pour tout ce qui se fera après, ne dure finalement pas plus de cinq années. Face à l'hostilité des producteurs, qui se rendent aux injonctions des pouvoirs publics, et devant la médiocre mobilisation du public – les spectateurs n'ont jamais beaucoup apprécié des films qui leur renvoient l'image des misères du pays –, les cinéastes se détournent progressivement des exigences du mouvement. En 1952, une œuvre comme Roma ore undici (Onze Heures sonnaient) de Giuseppe De Santis ou, en 1953, L'amore in città, le film manifeste coordonné par Cesare Zavattini (1902-1989) et réalisé par Michelangelo Antonioni, Federico Fellini, Alberto Lattuada, Carlo Lizzani, Francesco Maselli, Dino Risi, marquent la charnière entre l'époque néo-réaliste et les années 1950.

<em>Paisà</em>, R. Rossellini - crédits : OFI-FPP/ Everett Collection/ Bridgeman Images

Paisà, R. Rossellini

Quatre cinéastes – Roberto Rossellini, Vittorio De Sica, Luchino Visconti, Giuseppe De Santis – constituent les figures dominantes de ce qu'André Bazin a appelé, dans un article de la revue Esprit, en janvier 1948, « l'école italienne de la Libération ». Avec sa trilogie de la guerre – Roma città aperta (Rome ville ouverte, 1945), Paisà (1946), Germania anno zero (Allemagne année zéro, 1948) –, Rossellini montre les horreurs de l'occupation nazie à Rome, évoque la guerre de libération contre les oppresseurs nazi-fascistes et décrit le traumatisme d'une Allemagne vaincue qui sombre dans le désastre matériel et moral consécutif à la chute du IIIe Reich. Associé à Cesare Zavattini qui écrit les scénarios, Vittorio De Sica s'affirme dans les années d'après guerre comme le cinéaste le plus cohérent, le plus soucieux de l'approfondissement de son discours critique. Il tourne successivement Sciuscià (1946), Ladri di biciclette (Le Voleur de bicyclette, 1948), Miracolo a Milano (Miracle à Milan, 1951), Umberto D. (1952). Ces quatre films constituent le portrait saisissant de l'Italie d'après guerre avec ses délinquants juvéniles, ses chômeurs, ses sous-prolétaires, ses retraités aux abois. Luchino Visconti, qui a jeté les bases du mouvement en 1942 avec Ossessione, ne tourne qu'un seul film proprement néo-réaliste, La terra trema (La terre tremble, 1948). À l'origine, le projet prévoyait trois volets consacrés respectivement aux pêcheurs, aux paysans, aux mineurs : la réalité économique en décida autrement et seul vit le jour « L'Épisode de la mer ». Giuseppe De Santis, conscient à la fois des responsabilités de l'intellectuel par rapport à l'engagement politique et de l'artiste par rapport aux nécessités du spectacle, décrit avec Caccia tragica (Chasse tragique, 1947) la volonté des anciens partisans de mettre en valeur la terre qui leur est confiée. Riso amaro (Riz amer, 1949) et Non c'è pace tra gli ulivi (Pâques sanglantes, 1950) abordent les problèmes du prolétariat rural dans des histoires fortement romanesques[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite, université professeur émérite, université Paris I-Panthéon Sorbonne

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Médias

<em>Ossessione</em>, L. Visconti - crédits : Industria Cinematografica Italiana/ Everett/ Aurimages

Ossessione, L. Visconti

<em>Paisà</em>, R. Rossellini - crédits : OFI-FPP/ Everett Collection/ Bridgeman Images

Paisà, R. Rossellini

Le cinéaste Ettore Scola - crédits : R. Petrosino/ Mondadori Portfolio/ Getty

Le cinéaste Ettore Scola