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BOLOTNIKOV IVAN ISSAÏEVITCH (mort en 1608)

Chef du soulèvement populaire qui éclate dans le sud-ouest de la Russie en 1606-1607 et qui menace un moment l'ordre social, après l'accession au trône du tsar Chouïski (1606-1610), représentant de la haute noblesse. Né serf du prince Teliatevski, Bolotnikov aspire tout jeune à la liberté, qu'il obtient en s'enfuyant chez les cosaques du Don. Capturé peu après par les Tatars, il est vendu comme esclave aux Turcs qui en font un galérien. Ayant réussi à s'évader, c'est par Venise et à travers la Pologne qu'il revient en Russie, à Poutivl, en 1606, au moment où éclate le soulèvement populaire contre le gouvernement de Basile Chouïski.

Remarquable meneur d'hommes, organisateur de talent, Bolotnikov, surnommé le « preux », prend rapidement la tête du soulèvement qui se propose de renverser le gouvernement du tsar au nom du faux Dimitri, le fils d'Ivan IV, qui aurait miraculeusement échappé à la mort. Le mouvement, composé originellement de paysans et de serfs, prit naissance dans la région de Komaritch et fut renforcé, après la victoire des insurgés sur les troupes tsaristes, en août 1606, près de Kromy, par l'appoint des milices de la petite et moyenne noblesse, commandées par I. Pachkov et Liapounov. Les deux armées insurrectionnelles se dirigent alors vers Moscou qu'elles atteignent le 7 octobre 1606. La situation du tsar Chouïski est très critique. En effet, Bolotnikov fait circuler dans Moscou des appels au soulèvement contre l'oppresseur. D'après différents documents, les forces des insurgés atteignent alors de 60 000 à 100 000 hommes. Mais l'ampleur du mouvement populaire et les aspects révolutionnaires des proclamations de Bolotnikov (liberté pour les paysans, extermination des boyards et distribution de leurs terres et de leurs richesses aux paysans) effrayent les chefs de la petite et moyenne noblesse qui, l'un après l'autre, rallient le parti des forces gouvernementales en novembre 1606.

Battu le 2 décembre, près de Moscou, et ayant subi de lourdes pertes, Bolotnikov se replie sur Kalouga. C'est alors qu'il reçoit l'appui des peuples non russes de la Volga, qui mettent le siège devant Nijni-Novgorod, ainsi que des cosaques du Don. Le mouvement prend alors un caractère de libération nationale. Ces renforts permettent à Bolotnikov de reprendre l'offensive et de s'emparer de Toula, où il s'installe au printemps de 1607. Le tsar Chouïski prend alors des mesures pour en finir avec les insurgés : d'une part, il promulgue le 9 mars 1607 un code qui, en aggravant la condition des paysans et des serfs, doit renforcer la cohésion de la noblesse ; d'autre part, il prend lui-même la tête de l'armée qui assiège Toula. Le 10 octobre 1607, après quatre mois, la ville, affamée, se rend contre la promesse de la vie sauve pour les occupants. Il s'ensuit néanmoins une répression sanglante dont sont victimes Pierre, le prétendu fils du tsar Fedor Ivanovitch que les cosaques du Don avaient placé à leur tête, et Bolotnikov, emprisonné à Kargopol puis aveuglé et noyé en mars 1608.

Ce soulèvement populaire de 1606-1607 ouvre la série des grands soulèvements qui vont affecter l'État russe aux xviie et xviiie siècles, et montre la précarité du pouvoir moscovite dans les régions marginales de la Russie, récemment conquises.

— Jean-Pierre ARRIGNON

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