POSSOCHKOV IVAN TIKHONOVITCH (1652-1726)
Fils d'un orfèvre sur argent de la banlieue moscovite (et non point paysan, comme le voulait la légende romantique), employé à l'Hôtel des monnaies, puis chargé de construire des fontaines à Novgorod, patron d'une distillerie et propriétaire illégal de 300 hectares et d'une centaine de serfs, Possochkov est un bel exemple d'ascension sociale à l'époque où la Russie se modernise. Mais il ne prend place dans l'histoire que plus d'un siècle après sa mort, quand on redécouvre le mémoire qu'il avait rédigé, à la fin de sa vie, à l'intention de Pierre le Grand.
Dans ce Traité de la pauvreté et de la richesse, il propose une timide réforme sociale et un véritable programme de développement économique. Sans critiquer le principe du servage, dont il était personnellement bénéficiaire, il suggère que la loi réglemente la surface des tenures paysannes et le montant des redevances. Ses théories économiques manquent de rigueur, car il juxtapose l'ardeur novatrice du bourgeois moderne et le corporatisme du marchand médiéval : il rêve d'exclure du commerce et de l'industrie la noblesse et la paysannerie, il préconise le refus de vendre aux étrangers aussi longtemps qu'ils n'accepteront pas des prix de monopole. Mais il apporte son concours enthousiaste au mercantilisme du tsar : tout en se méfiant des Allemands, il admet la nécessité temporaire des spécialistes étrangers, il croit en l'avenir des manufactures, il veut encourager la prospection minière, l'esprit d'épargne et d'invention. Preuve que, contrairement à une légende tenace, l'industrialisation voulue par Pierre le Grand n'était pas une implantation entièrement artificielle.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Jean-Louis VAN REGEMORTER : chargé d'enseignement à l'université de Clermont-Ferrand
Classification