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VAZOV IVAN (1850-1921)

Romans de nostalgie

Vazov a doté la poésie bulgare naissante d'une grande richesse de thèmes, d'une infinité de rythmes et d'images et a le mérite d'avoir sensiblement assoupli la langue poétique. Non moins grands sont ses apports dans le domaine de la prose, où toute une école de conteurs peut se réclamer de lui.

Son expérience de juge lui a fourni la matière d'une nouvelle comique, Mitrophane et Dormidolski (1881) ; la vie des émigrés bulgares qu'il avait connus en Roumanie trouve une émouvante évocation dans Sans feu ni lieu (1883) ; un charme tout particulier se dégage des nouvelles Hadji Achille (1882) et Les Compères (1885), où il fait revivre avec une sympathie non dissimulée toute une galerie de types truculents qu'il avait observés dans sa jeunesse. Cependant, dans des recueils de contes où il prospecte son époque, tels Esquisses et croquis (1895), Un monde bariolé (1902), on sent déjà une note désabusée. Car, comme la plupart des écrivains de sa génération, il a une attitude critique à l'égard de la vie nouvelle, dépourvue à ses yeux d'idéal. C'est au passé qu'il a emprunté la trame de ses œuvres les plus attachantes, c'est au passé qu'est consacré son beau roman Sous le joug (1889-1890). C'est là l'œuvre maîtresse de Vazov qui, à elle seule, aurait suffi à lui assurer la gloire. Dans le cadre de l'insurrection d'avril 1876, il a su recréer, avec l'émotion des choses vécues, l'atmosphère d'une petite ville bulgare, qui n'est autre que sa ville natale, pendant les dernières années de la domination ottomane : tableau d'une vie à jamais disparue et qu'avait connue l'écrivain dans son adolescence, vie pleine de charme et de pittoresque, dans cette vieille bourgade enfouie sous la verdure, animée par les faits et gestes de ses habitants. Tous ces artisans, petits commerçants et notables gardent leurs idées traditionnelles, veillent jalousement sur la pureté des mœurs et s'occupent avec gravité de la chose publique. Le bruit du monde extérieur leur parvient estompé et souvent déformé. La petite ville a son café, gazette vivante de tous les potins et centre des discussions politiques, son couvent de femmes, où se nouent et se dénouent toutes les intrigues ; elle a aussi son école, objet de ses soins les plus attentifs. Sur cette toile de fond, Vazov a évoqué l'élan vers la liberté qui emporta ses compatriotes, la fièvre des préparatifs d'un soulèvement avec le cortège inévitable de héros et de traîtres et surtout le naïf enthousiasme de tous ceux qui croyaient pouvoir secouer un empire encore redoutable à l'aide de vieux tromblons rouillés et de canons en bois de cerisier. Foi naïve, élevée par les Bulgares à la hauteur d'une épopée nationale.

Le temps n'a pas terni l'éclat de cette œuvre qui, dès le début, eut un immense succès en Bulgarie aussi bien qu'à l'étranger. Bien vite se sont succédé les éditions, puis les traductions. Deux autres romans, Terre nouvelle (1896) et La Reine de Kazalar (1903), sont venus compléter cette fresque de la vie bulgare, sans approcher, même de loin, le succès de Sous le joug.

Le théâtre de Vazov, qui est la partie la moins réussie dans sa création, mais qui, pourtant, a fait école, est entièrement consacré à l'histoire du Moyen Âge bulgare. L'édition des œuvres de Vazov faite du vivant de l'écrivain comporte vingt-huit volumes, suivie depuis lors d'éditions plus complètes.

— Nadia CHRISTOPHOROV

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    ...donné qu'une assez imparfaite ébauche. La personnalité la plus représentative de cette génération d'écrivains et même des lettres bulgares modernes est Ivan Vazov (1850-1921). Poète, romancier, auteur dramatique, il a marqué de son empreinte tous les domaines. Son œuvre poétique, réunie en une vingtaine...