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OUD JACOBUS JOHANNES PIETER (1890-1963)

Braque et Picasso, les fondateurs du cubisme, n'ont jamais dessiné ou peint un seul cube : bien au contraire, ils se sont attachés à briser l'illusion scénographique qui, depuis la fin du xive siècle, se déployait, en Occident, dans l'espace imaginaire de ce volume. Aussi est-ce un non-sens (on le commet fréquemment) de parler d'architecture cubiste à propos de l'œuvre de Wright, de Loos, de Berlage, de Dudok, de Rietveld, de Pieter Oud : il n'y a aucune liaison entre le « cubisme » pictural et l'architecture des années 1920-1940. Avancer, par conséquent, que l'architecture du Stijl, mouvement dont Oud est cofondateur en 1917 avec Van Doesburg et Mondrian, relève du cubisme demeure une grossière erreur historique et dialectique, tant il est vrai que l'éclatement opéré par les structures cubistes n'a rien de commun avec la démarche de Wright (premier modèle de Oud) qui tendait à gommer la notion d'enveloppe continue pour introduire des plans de pénétration susceptibles d'incorporer des portions d'espace-milieu à l'ancien espace-limite. Et c'est précisément au moment où le cube comme instrument géométrique est abandonné par la peinture qu'il est traité avec une rigueur exceptionnelle en architecture : les architectes du Stijl en font, avec le parallélépipède rectangle, leur structure privilégiée, sinon une forme a priori de la conscience, pour développer, après les licences romantiques du modern style, une architecture de l'angle droit, une architecture puriste, formaliste, esthétisante, directement dérivée des spéculations picturales néo-plasticistes. Dès lors, écrit Oud (1921), « l'architecture qui se base d'une façon rationnelle sur les circonstances de la vie moderne fera un contraste à tous points de vue avec l'architecture actuelle. Sans tomber dans le rationalisme aride elle sera avant tout objective, mais elle éprouvera dans cette objectivité le début du sublime. Contrastant le plus violemment possible avec les produits non techniques sans forme ni couleur de l'inspiration immédiate, tels que nous les connaissons, elle figurera les problèmes qu'on lui pose en s'abandonnant entièrement au but, de manière presque impersonnelle, plastique de façon technique, pour devenir des organismes de forme nette et de proportions pures. » Au niveau formel, le passage des structures asymétriques de l'écran-surface aux trois dimensions de l'espace architectural s'amorce nettement dans un projet d'usine à Purmerend (cité natale de Oud) élaboré en 1919 et s'accomplit avec une singulière orthodoxie en 1924-1925 (c'est-à-dire trois ans après qu'il eut démissionné du groupe du Stijl) lorsqu'il construit le café De Unie à Rotterdam (détruit en 1940), ville dont Oud est l'architecte en titre depuis 1919 : l'ouvrage est en tous points conforme à la doctrine à laquelle Oud s'est cependant abstenu de souscrire (il n'a signé aucun des manifestes du Stijl). Voilà autant d'indices contradictoires. Signes d'ambivalence aussi d'une démarche trop enracinée dans le contexte politique et social, trop essentiellement fondée sur le sens démocratique et sur le respect des désirs du citoyen auquel elle s'adresse sans jamais vouloir s'imposer (l'architecture est ici pensée comme un service social) pour se satisfaire de visées esthétiques ou mécaniquement fonctionnalistes. C'est probablement pourquoi, entre des débuts sentimentaux orientés par Wright et Berlage et les décisions de la maturité, simultanément hostiles à la neutralité et aux principes directeurs du style international des années 1925-1950 (bâtiments administratifs de la société Shell à La Haye, 1938 ; sanatorium biomarin près d'Arnhem, 1952-1960), la phase néo-plasticiste peut être vue, au-delà des apparences, comme un moyen radical d'épurer la construction en mettant[...]

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Écrit par

  • : directeur de l'École nationale supérieure d'architecture et des arts visuels, Bruxelles

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  • CONSTRUCTIVISME

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    • 2 médias
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