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AUDIARD JACQUES (1952- )

Fils de Michel Audiard, scénariste-dialoguiste à succès, Jacques Audiard est né le 30 avril 1952 à Paris. Il a été monteur, ensuite scénariste, d’abord avec son père (Le Professionnel, de Georges Lautner, 1981 ; Mortelle randonnée, de Claude Miller, 1983) ou avec Denys Granier-Deferre (Réveillon chez Bob, 1984), puis avec Jérôme Boivin, pour ses premiers films, auquel il fournit des histoires surprenantes (Baxter, 1989 ; Confessions d’un barjo, 1992). Depuis 1994, Jacques Audiard est un auteur-metteur en scène de récits complexes aux personnages imprévisibles, dont la violence esthétique souligne la vision inquiète d’un monde chaotique et difficile à appréhender.

De façon étonnante, son premier long-métrageRegarde les hommes tomber (1994) suit en montage parallèle l’histoire de deux truands minables et le parcours de celui qui se lance à leur poursuite. Cette temporalité malmenée introduit ainsi constamment du vivant et de l’imaginaire à l’intérieur d’une inquiétante communication virtuelle.

Un héros trop discret(1996) déconstruit pour sa part le portrait d’un imposteur sous l’Occupation en recourant à l’humour noir d’un patchwork de flash-back mêlé aux interventions de faux témoins et aux confessions a posteriori du protagoniste lui-même, vieilli et devenu philosophe ; le vrai et le réel sont ainsi malmenés à mesure que le destin du personnage passe de l’extraordinaire à l’improbable : où est la vérité ?

Sur mes lèvres (2001) développe un polar sentimental survolté à partir d’une idée (une sourde se sert de sa capacité à lire sur les lèvres) et d’un insolite duo d’acteurs formé par Emmanuelle Devos et Vincent Cassel. Composé essentiellement de gros plans en mouvement, le récit est mené à un rythme haletant.

De battre mon cœurs’est arrêté (meilleur film et meilleur réalisateur aux césars 2006) filme la rédemption d’un voyou par la musique et l’amour. Tom (Romain Duris), hypernerveux cruel, exploiteur de la misère humaine, chargé des basses besognes par son père, marchand de biens véreux (Niels Arestrup), veut brusquement, longtemps après la mort de celle-ci, reprendre le métier de sa mère : pianiste concertiste. Mais une telle crapule peut-elle devenir un virtuose ? C’est le pari tenu d’un film tendu, tourné caméra à l’épaule, et de personnages forts comme sa professeure de piano (Linh-Dan Pham) qui parvient à instaurer une communication artistique avec Tom sans le recours aux mots. Le final de ce dur roman d’apprentissage répond à la laideur du monde en filmant un personnage qui, apaisé, finira par trouver sa place.

À l’inverse, Un prophète (grand prix du jury au festival de Cannes 2009) s’interdit le moindre regard éthique dans le récit glacial de ce film carcéral. Avec Tahar Rahim et, à nouveau, Niels Arestrup pour protagonistes, le film est un tissu de ruses, de manipulations, de tromperies, de corruptions et autres jeux de pouvoir. Cette fois, le mal absolu sera vainqueur.

Lyrique mélodrame noir, De rouille et d’os (2012) est inspiré d'un recueil de nouvelles de l'écrivain canadien anglophone Craig Davidson. Saisi avec énergie au niveau des instincts, de la chair et du sang, dans un ancrage social tiers-mondiste situé sous le soleil de la Côte d’Azur, le film raconte l'alliance de deux êtres cabossés par la vie (Marion Cotillard et Matthias Schoenaerts) contre la cruauté du monde.

Palme d’or au festival de Cannes 2015, Dheepan s’attache à un rescapé de l’écrasement des indépendantistes tamouls en 2009 au Sri Lanka, représenté dans le court prégénérique par un affreux bûcher de cadavres. Après avoir constitué une famille de toutes pièces en s’adjoignant une femme seule et une jeune orpheline, il peut devenir le gardien apaisé d’une barre HLM dans la banlieue parisienne. Chaleureusement, Audiard décrit longuement la métamorphose de cet homme qui n’aimait[...]

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Écrit par

  • : professeur honoraire d'histoire et esthétique du cinéma, département des arts du spectacle de l'université de Caen

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