CHAILLEY JACQUES (1910-1999)
Figure de proue de la musicologie française, Jacques Chailley a formé plusieurs générations d'étudiants à la Sorbonne et a marqué la recherche musicologique par ses travaux sur la musique ancienne, ses ouvrages d'analyse harmonique et son action au sein de la Société française de musicologie, dont il fut vice-président entre 1959 et 1973.
Compositeur, chef d'orchestre et de chœur, pédagogue et musicologue, Jacques Chailley naît à Paris le 24 mars 1910 dans une famille de musiciens : son père, Marcel Chailley (1881-1936, fondateur du quatuor Chailley), est violoniste ; sa mère, Céliny Chailley-Richez (1884-1973), est pianiste, disciple de Raoul Pugno et partenaire du violoniste Georges Enesco, avec lequel elle enregistrera plusieurs disques ; sa sœur Marie-Thérèse Chailley sera altiste. Il travaille d'abord avec Nadia Boulanger (1925-1927) puis entre dans la classe de composition d'Henri Büsser au Conservatoire de Paris, tout en poursuivant des études littéraires à la Sorbonne. Un séjour à Amsterdam lui permet d'étudier la direction d'orchestre avec Willem Mengelberg et Bruno Walter (1935-1936) puis avec Pierre Monteux (1937). Mais c'est la musicologie qui l'attire : il travaille avec André Pirro, Yvonne Rokseth, Albert Smijers et Maurice Emmanuel. À la Sorbonne, Gustave Cohen lui fait découvrir le théâtre ancien et il fonde deux groupes, les Théophiliens puis la Psallette Notre-Dame, avec lesquels il fait revivre des spectacles de l'Antiquité et du Moyen Âge. Il participe ensuite à la fondation du Groupe de théâtre antique de la Sorbonne en 1935, avec Roland Barthes et Jacques Veil.
Ses premières œuvres, en tant que compositeur, attirent l'attention. Pendant l'Occupation, le compositeur Claude Delvincourt l'appelle à ses côtés au Conservatoire de Paris, où il est nommé sous-directeur en 1947 et professeur d'ensemble vocal en 1948. Professeur au lycée La Fontaine (1951-1969), il devient en 1952 professeur d'histoire de la musique à la Sorbonne et directeur de l'Institut de musicologie. Il y fonde, un an plus tard, les Concerts de midi, qu'il dirige jusqu'en 1996. Il est, en outre, directeur de la Schola Cantorum à Paris (1962-1981). En 1969, il participe à la fondation de l'U.F.R. de musicologie à l'université de Paris IV, dont il assure la direction jusqu'en 1973. Il continue à enseigner jusqu'en 1979. En 1991, il reçoit le prix du Conseil international de la musique de l'U.N.E.S.C.O. Il meurt à Paris le 21 janvier 1999.
Sa musique, solidement ancrée dans la tonalité, privilégie la mélodie. Considéré comme un indépendant par les lexicographes, Jacques Chailley s'inscrit dans la descendance de Fauré et de Debussy. Parmi ses ouvrages lyriques, Thyl de Flandre, créé à la Monnaie de Bruxelles en 1957, et Pan et la Syrinx, d'après Jules Laforgue, créé à l'Opéra-Comique en 1962, ont connu un certain succès ; il est également l'auteur d'un ballet, La Dame à la Licorne, sur un argument de Jean Cocteau (1953), de deux symphonies (1942-1947 et 1980-1984), d'un quatuor à cordes (1936-1939) et de nombreuses œuvres religieuses.
Ses convictions en ont fait un adversaire farouche de la musique sérielle, qu'il a toujours combattue avec un sens aigu de la polémique. Dans son Traité historique d'analyse musicale (1951, édition révisée Traité historique d’analyse harmonique, 1977), il applique à la musique occidentale sa théorie de la philologie musicale, héritée de la théorie de la résonance mise en lumière par Maurice Emmanuel, selon laquelle les harmoniques déterminent l'apparition dans l'histoire des intervalles consonants. Parmi ses ouvrages majeurs, il faut retenir La Musique grecque antique (1979), Histoire musicale du Moyen Âge (1950, 3e édition 1984) et « La Flûte enchantée[...]
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Écrit par
- Alain PÂRIS : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France
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