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BLONDEL JACQUES-FRANÇOIS (1705-1774)

Un professeur

Le Traité d'architecture connaît le succès, mais l'auteur ne sollicite pas pour autant la clientèle de ses riches lecteurs, il s'oriente vers un professorat qui préservera mieux son indépendance. Malgré les réticences de l'Académie royale d'architecture, jalouse de son propre enseignement, il ouvre en 1743, rue de la Harpe, une « École des arts ». Le cycle des études y est très complet. Blondel professe l'architecture et corrige le dessin « tous les jours, de huit heures du matin à huit heures du soir ». Des professeurs adjoints enseignent les mathématiques, la perspective, la coupe des pierres, la théorie des fortifications, le modelage, les proportions du corps humain, l'histoire et l'iconologie. Des leçons particulières offrent les compléments nécessaires à l'éducation d'un homme bien né. Fréquentée par des étudiants étrangers, l'institution de Blondel fut l'une des plus célèbres écoles d'art suscitées par le désir d'instruction qui régnait au xviiie siècle. Malheureusement, la prodigalité et la mauvaise gestion de l'artiste en compromirent la prospérité. Elle se releva péniblement d'une faillite, peut-être fictive, déclarée en 1754 et végéta pendant vingt ans. Entre-temps, Blondel est entré à l'Académie royale où il assurera jusqu'à sa mort l'enseignement officiel de l'architecture. Il élargit les programmes et, par de nouveaux moyens, suscita l'émulation. Ses cours, auxquels assistèrent l'Écossais Chambers, le Lorrain Richard Mique, le Hollandais Pieter de Swart, l'Allemand Christian T. Weinlig, furent aussi suivis par des amateurs. Blondel visait à former non seulement le talent des artistes, mais aussi le goût des hommes de qualité qui devaient être leurs protecteurs. Marigny, bien qu'il estimât moins le caractère de Blondel que son savoir, soutint les initiatives du professeur, qui donna une impulsion brillante et durable à l'école académique. Au cours de son long professorat, il avait peu recherché les commandes architecturales. Cependant, après la campagne de Fontenoy, il enveloppa d'un décor triomphal et délibérément baroque la porte Saint-Martin (dessins de son élève P. de Swart au musée Carnavalet). Il dressa le décor d'une scène tragique au collège Louis le Grand, transforma l'hôtel de Choiseul, rue de Richelieu, et donna des dessins pour l'archevêché de Cambrai.

Quand Blondel fit imprimer sa leçon d'ouverture de 1747, la rocaille commençait à décliner. Blondel appartient à ces esprits qui se tournent avec nostalgie vers le règne de Louis XIV et l'idéal de beauté simple qui était alors celui de la France. Vers 1730, L'Architecture française, publication de Jean Mariette, avait réuni les chefs-d'œuvre de Perrault, des Mansart et de leurs plus fidèles disciples. Blondel en entreprend une seconde édition augmentée de planches nouvelles et d'un commentaire critique. En un temps où la compétition économique et intellectuelle est vive avec l'Angleterre, le titre Architecture française est significatif et paraît répondre au Vitruvius britannicus de Campbell. Les jugements portés par Blondel révèlent ses préférences. Parmi les architectes du passé, Philibert de l'Orme et Salomon de Brosse méritent de grands égards ; Louis Le Vau pèche par sa lourdeur ; François Mansart et son neveu Jules Hardouin, « ce grand homme », ont approché de la perfection. Chaque été, Blondel conduisait ses élèves au château de Maisons, édifice qu'il tenait pour exemplaire. François Mansart y avait préféré les ordres superposés à l'ordre colossal, tracé des profils d'une distinction sans égale, subordonné les ailes à un corps central prédominant par son volume et sa hauteur, fondu tous les éléments dans une incomparable harmonie. Cet idéal[...]

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Écrit par

  • : conservateur du Patrimoine en chef de la Ville de Paris, membre associé de l'Académie d'architecture

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