JULLIARD JACQUES (1933-2023)
Figure intellectuelle de la « deuxième gauche », Jacques Julliard était un syndicaliste, un essayiste, un historien et un éditorialiste politique français. Il empruntait à ces divers registres tout en conférant à cette multiplicité de styles l’unité d’une même posture exigeante et d’un style acéré.
Engagement syndical
Jacques Julliard naît le 4 mars 1933 dans le petit village jurassien de Brénod (Ain), dont son père, son grand-père et son arrière-grand-père furent les maires. Après des études brillantes (khâgne au lycée du Parc à Lyon, École normale supérieure, agrégation d’histoire), il s’oriente très tôt, dès le milieu des années 1950, vers des engagements qui décideront du cours de sa vie, d’abord au sein de l’Union nationale des étudiants de France (UNEF), dans l’opposition à la guerre d’Algérie. C’est dans ce cadre qu’il fait la connaissance de Michel Rocard, qui dirige alors la Fédération nationale des étudiants socialistes (FNES, rattachée à la SFIO). Plus tard, il écrira l’histoire de la IVe République (La IVe République, coll. « Naissance et mort… », Calmann-Lévy, 1968), qui sera aussi l’histoire de la trahison par la SFIO des idéaux socialistes. La jeunesse de Jacques Julliard est également marquée par la fréquentation de la minorité de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC), animée par Paul Vignaux (spécialiste par ailleurs de la philosophie médiévale) et regroupée autour de la revue CahiersReconstruction, qui milite pour une laïcisation du syndicat. C’est ce courant qui conduira quelques années plus tard, en 1964, à la déconfessionnalisation de la centrale syndicale et à sa transformation en Confédération française démocratique du travail (CFDT). À l’invitation de Jean-Marie Domenach, qui en était alors rédacteur en chef, il collabore à la même époque à la revue Esprit. En 1966, c’est sur la recommandation de Domenach qu’il devient éditeur au Seuil, où il fonde et dirige la collection de poche « Politique ».
La rencontre avec Vignaux oriente Jacques Julliard vers l’étude du courant anarcho-syndicaliste du mouvement ouvrier, dont il se fera l’historien et dont il adapte l’héritage à la CFDT. Il devient ainsi l’un des théoriciens de l’autogestion, au côté d’Edmond Maire, secrétaire général de la Confédération, avec qui il coécrit La CFDT aujourd’hui(1975). Déjà, dans les années 1960, il avait fait partie de l’équipe dirigeante du SGEN-CFDT (Syndicat général de l’Éducation nationale-CFDT). De 1973 à 1976, il occupe à nouveau un poste de dirigeant syndical en siégeant au bureau national de la CFDT. Même après s’être éloigné du syndicalisme actif, il resta toujours proche de la CFDT et de ses combats, comme en attesteront encore ses chroniques sur le mouvement d’opposition à la réforme des retraites du printemps 2023, dans le magazine Marianne et dans le Figaro.
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Écrit par
- Joël ROMAN
: philosophe, ancien rédacteur en chef de la revue
Esprit
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