TESTART JACQUES (1939- )
Issu d'une famille nombreuse d'origine modeste, Jacques Testart, né le 3 octobre 1939 à Saint-Brieuc, voulait être trappeur ; il se retrouve à Hyères (Var), interne dans une école d'horticulture et d'arboriculture. C'est à cette époque qu'il découvre les écrits de Jean Rostand. Muni de son diplôme de jardinier, il entre ensuite au lycée agricole du Chesnoy à Montargis,pour y préparer une école d'ingénieurs accessible aux élèves non titultaires du baccalauréat. Après avoir été reçu premier au concours de l'école d'agriculture africaine d'Alger, il part en Algérie où il obtiendra un des derniers diplômes français d'ingénieur délivrés sur ce territoire.
Rapatrié en 1962, il s'inscrit, grâce à une équivalence, à l'université de Paris-VI dans la filière biologie. Jean Rostand, en réponse à un poème que Testart lui a adressé, l'invite à venir le voir à Ville-d'Avray (1964). La réflexion de ce savant, dont il connaît tous les ouvrages, continuera longtemps à guider la sienne. Des grenouilles et des hommes (1995) est l'écho posthume de leurs conversations.
Remarqué par le professeur Charles Thibault qui lui propose un contrat à l'I.N.R.A. pour travailler sur la gémellité chez les bovins, Jacques Testart rédige sa première publication sur le placenta (1966), puis décrit les techniques qui permettent de produire des embryons de vaches sélectionnées et de les transférer dans l'utérus de mères porteuses. Dans le même temps, devenu assistant à Jussieu, il découvre la richesse du contact avec les étudiants et la misère des promotions pléthoriques du premier cycle des études scientifiques et médicales.
Recalé au concours de recrutement d'assistant de recherche à l'I.N.R.A. pour s'être opposé à son examinateur, il garde son poste d'enseignant à l'université et prépare sa thèse. Au cours de l'élaboration de celle-ci, il rencontre Pierre-Claude Léglise, qui le marquera profondément. Cet obscur technicien à l'I.N.R.A., qui a fréquenté le milieu existentialiste, l'initie à la chirurgie vétérinaire. Cet homme fascine Testart par son mépris de la santé – la sienne en particulier – et du pouvoir médical. Léglise, spécialiste des techniques chirurgicales, ne supportera pas que Testart l'associe comme coauteur à une publication sur les transferts non chirurgicaux d'embryons de bovins (1971) et ce sera la rupture entre les deux hommes. Ce personnage singulier réapparaîtra plus tard dans Simon l'embaumeur (1987), roman de Jacques Testart.
La thèse de Jacques Testart sur l'obtention et la transplantation d'œufs fécondés chez les bovins (1975) lui confère une compétence qui portera ses fruits lorsque la médecine de la fertilité, jusqu'alors balbutiante, émergera au moyen de l'instrumentalisation de la procréation. Il abandonne l'I.N.R.A. pour rejoindre en 1978 le laboratoire de physiologie de la reproduction humaine que dirige Émile Papiernick à l'hôpital Antoine-Béclère de Clamart. Il y développe la culture in vitro de follicules humains puis la fécondation in vitro (F.I.V.), alors que la première naissance mondiale issue d'une F.I.V. est annoncée en Grande-Bretagne (1978). Son ingéniosité lui permet de retrouver les détails techniques que les Britanniques ont omis de préciser et la naissance d'Amandine, en 1982, est saluée à la une de tous les journaux français. Il s'agit beaucoup plus d'une mise au point technique que d'une découverte scientifique, mais l'événement déclenche une véritable révolution sociale.
Récoltant les fruits médiatiques de cette innovation médicale, Jacques Testart apparaît aux yeux de beaucoup comme le « père » du premier « bébé-éprouvette » français. En 1986, pourtant, dans L'Œuf[...]
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Écrit par
- Bernard SÈLE : professeur de biologie du développement et de la reproduction, faculté de médecine, université de Grenoble-I-Joseph-Fourier
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