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ENSOR JAMES (1860-1949)

Du naturalisme au surréalisme

On a coutume de diviser l'œuvre de jeunesse en une période sombre ou réaliste (1879-1882) et une période claire, évoluant vers un irréalisme fantasque qui connut son apogée de 1887 à 1893. À vrai dire, les périodes et les manières se chevauchent. Pendant quelques années, après avoir quitté l'Académie de Bruxelles où il a passé trois ans, il peint effectivement des pêcheurs aux formes solides, il traite les natures mortes au couteau à palette, prestement, en une pâte grasse chère aux maîtres flamands du xixe siècle. Mais, parfois, les tons purs s'opposent hardiment, et bientôt les objets seront choisis en fonction de leurs couleurs claires, de leurs formes chantournées. Les coquillages et les porcelaines chinoises seront les plus aimés. Des années d'Académie datent déjà des scènes bibliques, influencées par Rembrandt et touchées par le fantastique. Turner et Goya lui ouvrent ensuite des voies divergentes. La Coloriste (1880), La Mangeuse d'huîtres (1883) sont des tableaux clairs. Les intérieurs bourgeois, comme La Musique russe (1880) et l'Après-midi à Ostende (1881), mêlent l'ombre à la clarté, réduisant les éléments à une unité atmosphérique que Paul Fierens considère comme essentiellement et spécifiquement impressionniste. Ce pendant, peu à peu, et surtout à partir de 1886, la lumière, qui avait été l'auxiliaire objectif de la réalité, devient la substance de l'œuvre. Absorbant les contours, effaçant toute frontière entre la vie et le rêve, elle se fait l'instrument d'une subjectivité exacerbée, différant par là de la lumière des peintres contemporains français. On dira d'Ensor qu'il pousse l'impressionnisme jusqu'au tachisme. La Chute des anges rebelles (1889), La Tentation de saint Antoine (1887) sont en effet tachistes et plus que fauves. Puis la ligne s'insère de nouveau dans la couleur, une ligne sinueuse, tantôt serpentant en arabesques qui procèdent de motifs chinois et japonais mais annoncent l'Art nouveau, tantôt brisée et saccadée, tantôt bouclée. Un certain nombre de tableaux semblent avoir été retravaillés après leur première exécution et les additions y introduisent des éléments fantastiques. Enfin, dans son âge mûr, Ensor a répété ses œuvres de jeunesse, mais sa main est devenue lourde et les effets sont forcés. Subsiste toutefois une fraîcheur de palette tantôt nacrée, tantôt acide et provocante.

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Média

<it>L'Intrigue</it>, J. Ensor - crédits : Fine Art Images/ Heritage Images/ Getty Images

L'Intrigue, J. Ensor

Autres références

  • BELGE JEUNE PEINTURE

    • Écrit par
    • 338 mots

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  • SPILLIAERT LÉON (1881-1946)

    • Écrit par
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    • 1 média
    Ainsi en va-t-il de ces deux artistes qui eurent une influence déterminante sur Spilliaert : James Ensor, dont l'œuvre de maturité n'est que la version aplatie, affaiblie et répétée de ses premières réussites, Maeterlinck, qui, après le très recueilli Trésor des humbles (1896) et...