JAMES-WEBB, télescope spatial
Les premières observations scientifiques prometteuses
Le 11 juillet 2022, l’image infrarouge la plus profonde de l’Univers jamais alors obtenue a été dévoilée par le président des États-Unis Joe Biden. Cette image de l’amas de galaxies SMACS 0723-23 est composite puisque obtenue à partir d’observations issues de six filtres. Le temps total d’observations est de six heures et quinze minutes. L’analyse de la couleur des galaxies permet de repérer celles qui sont potentiellement très lointaines. Très vite, les astrophysiciens se sont emparés des données ; plusieurs galaxies apparaissent plus lointaines que la galaxie la plus éloignée observée par Hubble. Même si ces distances devront être confirmées par des observations spectroscopiques ultérieures, on peut d’ores et déjà affirmer, avec l’obtention de cette première image, que le JWST a réellement ouvert la porte à l’exploration de l’Univers tel qu’il était quelques centaines de millions d’années après le big bang.
Grâce à la grande taille de son miroir, le télescope apporte non seulement une très grande sensibilité, permettant de voir des objets lointains ou intrinsèquement peu lumineux, mais également une finesse de détails très utiles, par exemple pour étudier la morphologie des galaxies, résoudre spatialement les disques de poussière dans lesquels les planètes se forment ou encore observer des exoplanètes par imagerie directe. Une comparaison d’images obtenues, d’une part, par le télescope spatial infrarouge Spitzer (lancé en août 2003) et, d’autre part, par le JWST, permet d’illustrer les capacités de ce dernier. D’autres exemples du potentiel du télescope pour différentes thématiques ont été dévoilés le 12 juillet 2022 : l’image du Quintette de Stephan montre des détails inédits sur l’interaction entre galaxies ; celle de la nébuleuse de la Carène nous fait pénétrer avec un luxe de détails dans un nuage moléculaire où des étoiles sont en train de se former. Outre des images, le James-Webb fournit également des spectres (décomposition de la lumière des objets célestes). Beaucoup moins parlants que les images, ils apportent cependant des informations indispensables pour étudier ces objets. Ainsi, le spectre de l’exoplanète géante gazeuse WASP-39b, découverte en 2011, montre pour la première fois de façon non ambiguë la présence de dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère d’un tel astre. Grâce au JWST, un nouveau chapitre de l’étude des exoplanètes s’est ouvert avec la caractérisation de leur atmosphère. Les informations recueillies vont permettre, entre autres, de mieux comprendre la formation et l’évolution des exoplanètes géantes, de déterminer si les exoplanètes rocheuses ont une atmosphère et si certaines atmosphères ont une composition et température indicatives d'un environnement pouvant abriter la vie.
Les astrophysiciens ont désormais entre leurs mains un télescope aux performances exceptionnelles. Le programme d’observations est renouvelé d’une année sur l’autre à partir des demandes effectuées par les chercheurs. La compétition est rude pour obtenir du temps d’observation. En effet, pour sa première année de fonctionnement, il y a eu quatre à cinq fois plus de temps demandé que de temps à attribuer. Bien que la durée de vie nominale de ce télescope soit de cinq ans, on espère bien qu’il restera opérationnel beaucoup plus longtemps.
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Écrit par
- Pierre-Olivier LAGAGE : docteur en physique, chef du département d'astrophysique, Commissariat à l'énergie atomique (CEA)
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