HUS JAN (1370 env.-1415)
Passionnément attaché à la réforme de l'Église catholique, Jan Hus a dépassé les enseignements de John Wyclif par la hardiesse et l'étendue de son action qu'il a menée jusqu'au sacrifice suprême. Il apparaît ainsi comme le précurseur, à plus d'un siècle de distance, des grands réformateurs du xvie siècle, de Luther en particulier, qui préfacera la publication de ses œuvres en Allemagne.
Aussi soucieux de justice sociale (aspect sur lequel insistent surtout les historiens marxistes) que de morale religieuse, il fut en même temps un patriote qui demeure pour les Tchèques l'incarnation de leur conscience nationale forgée dans les guerres hussites, l'auteur de l'affirmation qu'ils n'ont cessé de répéter dans les heures difficiles : « La vérité vaincra. »
Le réformateur
Originaire de la région de Prachatice, en Bohême méridionale, Jan Hus tient son nom de son village natal, Husinec. Étudiant pauvre à l'Université de Prague, il devient bachelier en théologie (1394), puis maître ès arts libéraux (1396). Ordonné prêtre en 1400, doyen de la Faculté de théologie de Prague l'année suivante, Jan Hus apparaît surtout comme le plus illustre représentant de ce courant de prédication réformatrice, né au milieu du xive siècle de la crise morale de l'Église tchèque, que le grand schisme d'Occident aggrave encore. À partir de mars 1402, ses sermons rassemblent régulièrement plus de trois mille personnes dans la chapelle de Bethléem, destinée aux prédications en langue tchèque. Orateur officiel des synodes annuels de Bohême et confesseur de la reine, Hus bénéficie d'abord de l'appui de l'archevêque et du roi Venceslas IV (1378-1419) : jusqu'en 1408, c'est légalement qu'il prêche la réforme de l'Église et oppose la richesse corruptrice à la pauvreté évangélique. Car l'Évangile est, selon lui, la seule règle infaillible et suffisante de la foi, et tout homme a le droit de l'étudier pour son propre compte ; il entreprend donc de le traduire en tchèque.
Alors que les querelles du schisme et la misère exaspèrent la haine entre Tchèques et Allemands de Bohême, Hus rappelle qu'il préfère « un bon Allemand à un méchant frère » ; mais il lutte pour que les Tchèques soient maîtres en leur patrie. Revendiquant l'emploi de la langue tchèque dans la vie publique contre la prépondérance de l'allemand, il bannit les tournures germaniques et simplifie l'orthographe tchèque par l'introduction des signes diacritiques. Il écrit certains de ses ouvrages dans sa langue nationale. En 1409, il obtient du roi Venceslas le décret de Kutná Hora qui met fin, au profit des Tchèques, à la mainmise allemande sur l'Université, dont il est élu recteur. Il célèbre dans la victoire polonaise de Grunwald (1410) le triomphe de la justice et des Slaves opprimés.
Son admiration pour le théologien John Wyclif (1320 env.-1380), auquel souvent il se réfère, permet à ses ennemis de confondre sa cause avec celle du réformateur anglais et de l'accuser d' hérésie. Comme il refuse d'accepter la condamnation de Wyclif dont les ouvrages sont brûlés à Prague le 16 juillet 1410, une première excommunication le frappe en 1411, malgré l'appel adressé à Rome et le soutien du roi et des Praguois. Il n'en continue pas moins ses prédications ; en 1412, il prononce d'ardents réquisitoires contre les indulgences dont la vente doit financer la guerre de l'antipape Jean XXIII contre Ladislas de Naples. L'exécution de trois de ses jeunes disciples dresse le peuple de Prague derrière son prédicateur. Cette fois, il est l'objet d'une excommunication majeure, et la ville est frappée d'interdit du moment qu'il y séjourne.
Hus se retire alors en Bohême méridionale, à Kozí Hrádek,[...]
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Écrit par
- Michel LARAN : maître de recherche au C.N.R.S.
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