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ŁUKASIEWICZ JAN (1878-1956)

Philosophe et logicien polonais, né à Lwów, Łukasiewicz fit des études de mathématiques et de philosophie dans sa ville natale. Il obtint son doctorat de philosophie en 1902, enseigna d'abord à Lwów, puis voyagea en Europe et, de 1915 à 1918, enseigna à l'université de Varsovie. En 1918, il appartint au cabinet du ministre polonais de l'Éducation nationale. En 1919, il retourna à l'université de Varsovie où il resta professeur jusqu'en 1939. Après la guerre, il quitta Varsovie pour Munster, puis Bruxelles. En dernier lieu, c'est à Dublin qu'il se fixa en 1946 comme professeur de logique mathématique.

S'il fut l'élève de Twardowski, son souci de clarté et de précision, son horreur de l'obscurité et de l'équivoque le rapprochent de G. E. Moore et, d'une manière générale, du mouvement de la philosophie analytique. Il critique Kant pour avoir finalement donné naissance à l'idéalisme allemand et, dans un article programmatique de 1927 sur la méthode en philosophie, il formule quelques exigences : ne traiter que les problèmes que l'on peut formuler clairement, ensuite essayer d'y répondre selon la méthode de la logique mathématique, c'est-à-dire déductive et axiomatique, maintenir le contact avec le réel, ne pas créer d'entités mythiques et chimériques, tenir compte notamment des résultats des sciences. Exigences difficiles à satisfaire, s'il est vrai qu'il est dans la nature de la philosophie de ne pouvoir s'exprimer en un système de type euclidien. Malgré une indéniable proximité avec le Cercle de Vienne, Łukasiewicz, comme la plupart des philosophes logiciens polonais, est beaucoup moins radical ; il n'opère pas les mêmes réductions ni les mêmes simplifications ; il élève des objections contre la tentative carnapienne de réduire des questions objectives à des questions linguistiques (1936).

En l'absence de traduction de ses œuvres philosophiques, Łukasiewicz est surtout connu comme logicien et comme historien de la logique antique. Déjà dans sa première publication (Cracovie, 1910), intitulée Sur le principe de contradiction chez Aristote, dans laquelle il distingue trois formes de ce principe (ontologique, logique et psychologique), il profite de l'occasion qui lui est donnée pour attirer l'attention des lecteurs polonais sur l'une des antinomies russelliennes. Il consacre ensuite son énergie à l'élaboration de la logique des propositions. En 1917, il instaure une logique trivalente grâce à la notion de possible suggérée par la lecture d'Aristote. Il espère par là surmonter le déterminisme en philosophie qu'il croit impliqué par l'acceptation du principe de bivalence (il reviendra ensuite sur cette position). Il généralise ce point de vue à la constitution de logiques plurivalentes à n valeurs et, à la fin de sa vie, interprète la logique modale d'Aristote à l'intérieur du cadre d'un système à quatre valeurs. L'intérêt de ces recherches est philosophiquement de montrer que la logique n'est pas quelque chose de rigide mais que, même à un très haut degré de généralité, il y a des alternatives possibles. Étudiant la logique propositionnelle classique, il révèle que les systèmes d'axiomes de Frege, de Hilbert et de Russell contiennent chacun un axiome différent redondant ; d'où des travaux sur la consistance, la complétude et l'indépendance des axiomes.

C'est peut-être pour ses études de logique ancienne qu'il est le plus connu, en France du moins. Il reconstitue la logique stoïcienne des propositions depuis Philon de Mégare. Surtout il renouvelle la présentation de la syllogistique aristotélicienne (Aristotle's Syllogistic, 1951). Sa thèse originale est que les syllogismes aristotéliciens ne sont pas comme on l'a cru des schèmes[...]

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Écrit par

  • : agrégée de l'Université, docteur en philosophie, maître de conférences à l'université de Rennes

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