POTOCKI JAN (1761-1815)
Historien et archéologue polonais, considéré comme le fondateur de l'ethnologie slave. Grand voyageur, Jan Potocki parcourt l'Europe (à Paris, il fréquente les salons), l'Afrique et l'Asie afin d'y mener, par l'observation des races, des langues, des coutumes, des vestiges du passé et par l'attention particulière qu'il porte aux traditions orales, une vaste enquête sur l'origine des peuples européens, et spécialement des peuples slaves. Il est l'auteur d'un grand nombre d'ouvrages, tous rédigés en français (le français est alors la langue de l'Europe cultivée) et souvent tirés à cent exemplaires seulement, notamment d'un Essai sur l'histoire universelle et recherches sur celle de la Sarmatie (1789-1792), de Chroniques, mémoires et recherches pour servir à l'histoire de tous les peuples slaves (1793), de Fragments historiques et géographiques sur la Scythie, la Sarmatie et les Slaves (1796), d'une Histoire primitive des peuples de la Russie (1802), d'un Atlas archéologique de la Russie européenne, de récits de voyages (en Turquie, en Égypte, en Hollande, en Saxe, sur le Pont-Euxin, dans les steppes de l'Astrakhan et du Caucase).
En 1812, Potocki, en proie à la neurasthénie, se retire en Pologne dans ses propriétés. Au cours de ses accès de mélancolie, il lime la boule d'argent qui surmonte le couvercle de sa théière. Lorsqu'elle se trouve enfin à la dimension voulue, le comte la glisse dans le canon de son pistolet et se fait sauter la cervelle.
Avant sa mort, Potocki avait terminé un étrange roman Le Manuscrit trouvé à Saragosse (1804-1813). Ce livre, publié partiellement par Roger Caillois en 1958, puis dans une édition quasi complète en 1989 par René Radrizzani, qui s'est efforcé de collationner toutes les sources existantes, se présente comme une suite de contes fantastiques, qui répètent et varient dans leurs emboîtements le même thème et la même péripétie : les amours d'un voyageur avec deux sœurs qui se révèlent être des démons liés à la constellation des Gémeaux. Les nouvelles du recueil, réparties en « journées », à la manière des anciens décamérons, appartiennent encore au xviiie siècle par leur inspiration libertine, les épisodes sensuels, la rapidité élégante du style, mais anticipent aussi sur le romantisme, empruntant son décor au roman noir, par la fascination de l'horrible et du macabre : spectres, pendus, apparitions, succubes, revenants, force des ténèbres et goût de l'angoisse font de Potocki à la fois un précurseur et un maître du genre fantastique.
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Écrit par
- Bernard CROQUETTE : agrégé de l'Université, maître assistant à l'université de Paris-VII
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Autres références
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EXPLORATIONS
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