JANE EYRE, Charlotte Brontë Fiche de lecture
Respect et subversion des valeurs victoriennes
Si Jane Eyre est un roman historiquement victorien, il n'est cependant guère surprenant qu'il ait connu un succès de scandale à sa parution, surtout lorsque l'on découvrit que l'auteur était une femme. Jane Eyre, en effet, n'hésite pas à proclamer son amour pour un homme de vingt ans son aîné, issu d'un milieu social supérieur et qui est de surcroît son employeur. Quant à ses déclarations passionnées, elles annoncent le féminisme : Jane proclame son égalité avec le maître de Thornfield, qu'elle n'hésite pas à quitter lorsqu'il lui offre un mariage bigame. Elle bouleverse les credo victoriens et subvertit la hiérarchie patriarcale. Si elle revient à la fin, c'est parce qu'elle a réussi à trouver un équilibre entre amour sacré et amour profane, et qu'avec l'aide de la Providence, fréquemment invoquée, elle peut se prévaloir d'une fortune qui la fait l'égale de son futur époux. Rochester est devenu dépendant d'elle, et c'est Jane qui le choisit. La fin heureuse est en conformité avec les exigences de la morale et de la religion, d'où l'ambiguïté du roman : si l'héroïne défie les valeurs victoriennes, elle les respecte aussi. Le tour de force de Charlotte Brontë est d'avoir habilement subverti ces valeurs tout en affirmant sa foi en l'individu.
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Écrit par
- Claire BAZIN : professeure des Universités Paris-X Nanterre
Classification
Média