KÁDÁR JÁNOS (1912-1989)
D'origine paysanne, János Kádár est né à Somogy, en Hongrie occidentale. Ouvrier métallurgiste, il adhère en 1932 au Parti communiste clandestin et participe peu après à la direction de l'organisation de jeunesse à laquelle il appartient depuis 1931 ; l'une et l'autre organisation étant interdites, il est à diverses reprises incarcéré par la police du régent Horthy. La Gestapo l'arrête en 1944, mais il réussit à s'échapper. En 1945, il devient premier secrétaire du Parti communiste (devenu le Parti socialiste ouvrier hongrois, ou P.S.O.H.) pour la ville de Budapest, puis il est nommé membre du bureau politique et secrétaire général adjoint du parti. Il conserve ces fonctions en 1948 lorsque, après avoir absorbé le Parti social-démocrate, le Parti socialiste ouvrier se transforme en Parti des travailleurs hongrois. Nommé ministre de l'Intérieur la même année, il est chargé de préparer le procès de l'homme qui l'a précédé à ce ministère, László Rajk, accusé de titisme. Kádár, à son tour, devient suspect au gouvernement Rákosi. Arrêté en 1951, il est torturé mais n'est pas traduit en justice. Libéré en 1954, il n'est vraiment réhabilité qu'en juillet 1956 lorsque Rákosi doit renoncer à son poste de premier secrétaire. Kádár est alors réélu au bureau politique. Lorsque la révolte éclate en Hongrie, il est en Yougoslavie et accompagne le nouveau premier secrétaire, Ernö Gerö. Comme il faut, pour apaiser la population, installer aux commandes des hommes qui n'ont pas été compromis par le stalinisme ou qui en ont été les victimes, Kádár est nommé, le 25 octobre 1956, premier secrétaire du parti tandis qu'Imre Nagy prend la direction du gouvernement ; il s'emploie à reconstituer alors le parti. S'identifiant au cours nouveau, il dénonce les fautes commises dans le passé. Le 27 octobre, il entre dans le gouvernement Nagy. Cependant, le pouvoir est dépassé par les événements. Tandis que Nagy prend le parti des insurgés, Kádár s'effraie de l'ampleur de la révolte ; le 2 novembre, il quitte secrètement Budapest et entre en contact avec les autorités soviétiques. Le 4, il annonce qu'il a constitué (sans doute en U.R.S.S.) un gouvernement ouvrier et paysan qui sollicite le concours de l'armée soviétique pour rétablir l'ordre. Revenu à Budapest après l'entrée des chars soviétiques, il assure avec l'aide de Moscou une reprise en main de la situation qui coûtera au pays plus de 20 000 arrestations et l'exécution d'une centaine de personnes, dont Nagy en 1958. Il cumule les fonctions de premier secrétaire du parti et de chef du gouvernement.
Pendant quelques années, Kádár essaiera de se battre sur deux fronts : contre les staliniens et les contre-révolutionnaires. En fait, honni par une bonne part de la population, il a besoin de l'appui des staliniens, de ceux du moins qui ne sont pas trop marqués, et se consacre plutôt à la bataille sur le second front. Lorsque le calme est, au moins en apparence, revenu (en 1958), il renonce à la direction du gouvernement qu'il retrouve en 1961. Il juge alors possible d'appliquer la politique dont il rêvait en 1956 et lance le mot d'ordre qui deviendra célèbre : « Celui qui n'est pas contre nous est avec nous », voulant ainsi tourner définitivement la page de l'insurrection et de la répression. Tout en s'appliquant à être un allié exemplaire de l'U.R.S.S., il prépare à l'intérieur des réformes qui lui vaudront l'appui de la population et des intellectuels. La Hongrie devient le pays le plus « libéral » du camp socialiste et son gouvernement met en œuvre la réforme de gestion la plus audacieuse pour l'Europe de l'Est. L'appareil du parti abandonne aux techniciens une part de ses prérogatives traditionnelles. Après avoir mis l'entreprise en chantier, Kádár quitte en 1965 la présidence[...]
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Écrit par
- Bernard FÉRON
: chef adjoint du service étranger du journal
Le Monde
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