JAPON (Arts et culture) Le cinéma
Une crise de croissance moderne
Le Japon, dont les industries sont à la pointe des technologies de communication et de distraction, connaît dans les années 1980-1990, comme les autres pays du monde, une crise due à la concurrence de plus en plus forte de la télévision, de la vidéo (le cinéma à domicile) et, plus récemment, des jeux vidéo. Les indépendants, qui, au moment de l'émergence de la nouvelle vague, s'étaient regroupés dans la structure de l'Art Theater Guild, n'ont plus de salles pour montrer leurs films. Des cinéastes de l'ancienne génération (Kurosawa, avec DersouOuzala[DerusuUzara], 1975 ; Ran, 1982) comme de la nouvelle (Ōshima, avec L'Empire des sens[Ai no borei], 1976 ; Furyo[Merry Christmas, Mr. Lawrence, Senjo no Merry Christmas], 1983) doivent trouver à l'étranger, notamment en U.R.S.S., en France et en Grande-Bretagne, les moyens de produire leurs films que leur marché local ne veut pas financer, préférant se cantonner dans la série sécurisante des Tora-san (plus de quarante-cinq films à ce jour réalisés pour la plupart par Yamada Yoji) ou dans la production de films chambara irréalistes inspirés des bandes dessinées, (la série de Baby-cart dans les années 1970-1980, dont Misumi Kenji fut très souvent le réalisateur). L'industrie locale refuse le risque, l'expérimentation. L'apparition d'une nouvelle série de cinéastes se fait encore plus difficilement. Et même si eux aussi profitent d'une reconnaissance de l'étranger, Yanagimachi Mitsuo (Adieu, ma grande terre [Sarabaitoshikidaichi], 1982 ; Himatsuri, 1984), Oguri Kohei (L'Aiguillon de la mort[Shi no toge], 1990), Itami Junzō (Tampopo, 1987) ont bien du mal à réaliser régulièrement des films. Même l'ancien cinéaste indiscipliné Suzuki Seijun (le seul qui ait jamais fait un procès à son employeur, un grand studio) et Imamura, qui a pourtant reçu la palme d'or au festival de Cannes avec La Ballade de Narayama (Narayama bushi-ko, 1983), connaissent des difficultés. Même si certains profitent de leviers extra-cinématographiques (l'éditeur à succès Hadokawa Haruki devient producteur puis réalisateur ; Yoshida profite du mécénat d'un grand laboratoire pharmaceutique), la baisse des entrées nationales, la concurrence de la télévision et des loisirs domestiques annexes, la diminution des marchés extérieurs contribuent à une baisse sensible de la production et à la raréfaction des nouveaux talents.
Par ailleurs, les années 1980 vont être marquées par l'apparition de ces deux maître du cinéma d'animation que sont Miyazaki Hayao (Le Château de Cagliostro, 1979 ; Mon Voisin Totoro, 1988 ; Porco Rosso, 1992) et Takahata Isao (Le Tombeau des lucioles, 1988 ; Mes Voisins les Yamada, 2001), ou encore Otomo Katsuhiro (Akira, 1988). Ce renouveau va de pair avec l'indépendance que permet la création des studios Ghibli.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Hubert NIOGRET : critique de cinéma
Classification
Médias