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JAPON (Arts et culture) Le cinéma

La fin d’une époque

La deuxième décennie du xxie siècle est marquée par la mort, respectivement en 2013 et 2012, d’Oshima Nagisa, chef de file de la nouvelle génération, et de Wakamatsu Koji, trouble-fête du cinéma de genre et provocateur politique. Shinoda Masahiro et Yoshida Koji (anciennement Yoshishige), maintenant octogénaires, ne tournent plus. Le cinéma classique a disparu en 2008 avec son dernier représentant, Ichikawa Kon. Les actrices et acteurs les plus célèbres du cinéma japonais, Takamine Hideko, Yamada Isuzu, Mikuni Rentaro sont également décédés en 2010, 2012, 2013.

L’industrie cinématographique dominante poursuit la production des mêmes modèles en observant de près ce que fait la télévision. Quant au cinéma indépendant, démuni financièrement et dépourvu de moyens d’exploitation, il n’a pas de ressources nécessaires pour produire. Les nouveaux candidats à la réalisation semblent dépourvus d’ambition, se contentant de fabriquer des films techniquement irréprochables. Il est d’ailleurs significatif qu’en 2010 au festival de Tōkyō le film le plus apprécié ait été Post-cards(Ichimai ni hagaki) que réalisait à quatre-vingt-dix-huit ans le vétéran Shindo Kaneto, symbole de la production engagée et indépendante des lendemains de la Seconde Guerre mondiale (L’Île nue [Hadaka no shima]en 1960 a connu un succès mondial), tandis que le film promu par l’industrie était SP :The Motion Picture n°1 (SP : The Motion Picture yabô hon) de Takafuni Hatano, inspiré de la plus célèbre série de la télévision. Mais Shindo Kaneto est décédé à son tour en 2012, l’année de son centenaire. Auteur d’une œuvre à part entière, Kawase Naomi n’est guère appréciée qu’au festival de Cannes où elle reçut autrefois la caméra d’or pour son premier film (Suzaku, 1997) et où elle a présenté en 2014 Futatsume no mado (distribué sous le titre de Still the water).

C’est bien la question du rapport de l’industrie cinématographique et de ses auteurs qui est posée : le cinéma doit-il se conformer aux guides et aux modèles de l’économie, ou doit-il permettre l’expression d’auteurs qui, au cours de leur carrière, peuvent connaître aussi des succès commerciaux ? Autrefois des cinéastes comme Kurosawa Akira représentaient cet équilibre entre art et commerce, même si à la fin de sa carrière, le cinéaste de Madadayo a connu lui aussi des difficultés à rassembler le public dans son propre pays. Seule l’animation ces dernières années, avec notamment Miyazaki Hayao, a réussi à fusionner les différents publics de tous les âges, tant au Japon qu’à l’étranger.

Trois personnalités se détachent néanmoins : Kurosawa Kiyoshi, Miike Takashi, Kore-eda Hirokazu. Les deux premiers ont déjà une œuvre importante à leur actif – surtout Miike Takashi qui tourne tout ce qu’on lui propose dans tous les genres, tandis que Kurosawa Kiyoshi, depuis la deuxième partie de sa carrière, ne réalise que les projets dont il est à l’origine. Ils sont issus d’une production de films de genre, souvent tournée et exploitée en vidéo. Mais Miike Takashi a montré depuis 13 Assassins (Jusannin no shikaku, 2010), vingt ans après son premier film, qu’il pouvait aussi être l’auteur de films spectaculaires et plus classiques et sortir de la marginalité des films d’action modestes (Rainy Dog [Gokudokuroshakai], 1997), des parodies de films d’action (Dead of alive : Hanzaisha 1, 2, 3, en 1999 pour le no 1), des films provocants (Visitor Q [Bijita Q], 2001), des films ultraviolents (Ichi the Killer [Koroshiya], 2001 ; Crows Zero[KurozoZero], 2007, suivi de Crows Zero II en raison du très grand succès rencontré par le premier film). Son œuvre la plus marquante restele troublant Audition (Odishon, 1998).

Kurosawa Kiyoshi a beaucoup tourné à partir de 1983, et avec des budgets très modestes, avant d’être reconnu internationalement[...]

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Rashomon, A. Kurosawa - crédits : Hulton Archive/ Moviepix/ Getty Images

Rashomon, A. Kurosawa

<it>L'Empire des sens</it>, N. Oshima - crédits : Prod DB /KCS /Aurimages

L'Empire des sens, N. Oshima