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ADHÉMAR JEAN (1908-1987)

La Bibliothèque nationale de Paris conserve depuis Colbert (1667) des milliers d'images rassemblées dans le cabinet des Estampes. Gravures, affiches, dessins ou collections iconographiques, photographies enfin sont venus régulièrement s'accumuler au gré des acquisitions et des dons, mais surtout avec le flux du dépôt légal. Lieu de conservation de ces témoignages fragiles, rassemblés de façon unique en aussi grand nombre, mais également instrument de formation pour tous ceux qui ont à créer des images ou qui veulent les étudier. Le rôle du conservateur du cabinet des Estampes est d'être l'indispensable et discret gardien des collections et le guide de ceux qui s'aventurent dans le vaste labyrinthe. De 1961 à 1977, Jean Adhémar a été conservateur en chef du département après y être entré comme assistant en 1932. Archiviste paléographe de formation, c'est l'art médiéval qui a constitué son premier domaine de recherche (son premier article paraît dans le Bulletin monumental, il est consacré à Vézelay) et il publie un essai, les Influences antiques sur l'art du Moyen Âge français, au Warburg Institute de Londres en 1939. À la formation initiale de l'École des chartes s'est donc ajoutée la fréquentation de la Bibliothèque Warburg (dirigée par Fritz Saxl) et d'un milieu de grands érudits, novateurs dans l'analyse de l'œuvre d'art et de sa production, que Jean Adhémar devait mettre plus tard à contribution tels Erwin Panofsky, Meyer Schapiro ou Edgar Wind. Auprès d'Henri Focillon à Paris, il soutient en 1938 sa thèse de doctorat consacrée aux Lithographies de paysage en France à l'époque romantique, marque d'une inlassable curiosité sur l'art et les artistes du xixe siècle. Il développe — dans de nombreuses directions qui vont de la remarque inédite à la publication d'inventaires — une méthode dynamique d'analyse de l'image, usant de rapprochements et d'intuition visuelle mêlant à l'histoire la philologie, la littérature et la sociologie. C'est bien le processus de la création de l'œuvre (plastique ou littéraire) qui excite sa curiosité : l'amenant à relever dans un souci encyclopédique à la Flaubert l'étrange destin des gravures : « L'Huile comagène et César Birotteau » (Aesculape, 1951) ou encore l'organisation du « Cabinet d'Émile Zola » (Gazette des beaux-arts, 1960). Ce rôle de l'image dans la culture d'une époque est démontré au public à partir de 1950 par des expositions organisées sous l'impulsion de Julien Cain, administrateur général de la B.N. : Diderot et l'Encyclopédie (1951), Émile Zola (1963), Les Salons littéraires au XVIIe siècle (1968) ; elles accompagnent souvent les recherches sur l'histoire des mentalités, comme pour Les Joies de la nature au XVIIIe siècle (1971). Passionné par la diffusion de l'image, sa commercialisation, sa censure, Jean Adhémar s'est beaucoup intéressé à la critique d'art, donnant à Oxford avec Jean Seznec une édition des Salons de Diderot (1957-1967). Animant et formant une nombreuse équipe de conservateurs, il poursuit l'édition de l'Inventaire du fonds français (près de 20 volumes) des estampes de la Bibliothèque nationale, fait paraître seul ou en collaboration des ouvrages sur les maîtres du xixe siècle : Goya, Daumier (1954), Toulouse-Lautrec (1968), Edgar Degas (1973), présente des expositions sur des artistes moins connus : Gavarni (1955), Helleu (1967) ou Gustave Doré (1974), crée les Nouvelles de l'estampe (1963), revue qui traite de tous les domaines de la gravure. Historien de l'art, il s'est intéressé particulièrement au xvie siècle français, étudiant aussi bien le maniériste Antoine Caron (Médecine de France, 1951) que le burlesque[...]

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Écrit par

  • : historien de l'art, chargé de mission à la Caisse nationale des monuments historiques et des sites

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