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BAÏF JEAN ANTOINE DE (1532-1589)

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Jean Antoine de Baïf est unpoète français qui fit partie de la Pléiade. Dans Défense et illustration de la langue française, Joachim du Bellay cite « ces deux lumières françoyses, Guillaume Budé et Lazare de Baïf ». Fils naturel de ce dernier, Jean Antoine bénéficia d'une éducation humaniste hors pair. Né en 1532 à Venise, il fut confié dès le berceau à Ange Vergèce et à Charles Estienne, à huit ans à Jacques Toussaint, professeur de grec au Collège royal, avant de recevoir l'enseignement de Jean Dorat lui-même, qui devint son précepteur en même temps que celui de Ronsard dans la demeure des Baïf. À la mort du père en 1547, Jean Antoine suivit Dorat au collège de Coqueret, dont il était devenu le principal, où le rejoignirent Ronsard puis Du Bellay ; marathon d'humanisme au sens plénier du terme, ce fut aussi un beau et grand départ, celui de la Pléiade.

Clerc tonsuré, protégé de Charles IX, Baïf suscite en 1570, avec le concours du musicien Thibault de Courville, une académie de poésie et de musique qui se fond en 1574 avec l'Académie du palais, créée par Henri III. On ne peut plus érudit, esprit inventif et tâtant de tout, Jean Antoine aspirait à renouveler la rythmique traditionnelle, grâce à un apport musical dû à la métrique gréco-latine, ainsi qu'à réformer l'orthographe en s'appuyant sur la phonétique. Nouveautés dont témoignent en 1574 les Etrénes de poeziefransoèzeen versmezurés ainsi que les Chansonnettes mesurées, où interviennent maints thèmes populaires.

L'année précédente, les Euvres en rime présentaient une sorte de synthèse de l'œuvre antérieure de l'auteur dont la publication avait commencé au moins depuis 1552. Outre des poèmes divers, on y trouve des Amours non moins diverses – de Francine, de Méline et d'autres –, des Jeux, parmi lesquels une traduction de l'Antigone de Sophocle en alexandrins, L'Eunuque de Térence, enfin des Passetems(sorte de recueil d'épigrammes). Si la variété apparaît le caractère dominant de cette somme où les conceptions, les sujets et les formes se multiplient à l'envi, le talent de l'auteur s'y révèle inégal. D'où sans doute le succès relatif d'un ouvrage où à l'érudition parfois encombrante se mêlent des ardeurs qui n'ont rien de platonique et qui s'apparentent aux pages les plus érotiques de Ronsard. Ce qui n'empêcha pas le poète d'être aussi sensible au spirituel, ainsi qu'en témoignent les Prières (1587) tirées du Livre de Job et ses Psautiers qu'il travailla durant vingt ans (1567-1587) à traduire en latin et en français. En 1576, sous l'influence du courant gnomique, il publia Mimes, enseignements et proverbes, ouvrage qui connut des rééditions augmentées de textes inédits où se remarque une progression vers la satire.

Jean Antoine de Baïf pratiqua tous les genres littéraires en vogue à son époque, du lyrisme à la facétie, du théâtre tragique ou comique. Dans aucun il ne fut vraiment éminent et, malgré les effusions spontanées d'un tempérament fervent et voluptueux qui arrivent à ouvrir une brèche dans le réseau combien dense des réminiscences, qu'elles soient de Pétrarque, des Anciens ou des contemporains, il n'arrive pas à s'imposer. Il reste l'humaniste érudit, l'authentique homme de la Renaissance, par sa vitalité, son ouverture d'esprit en perpétuelle recherche. Et, tant par ses adaptations de Plaute (Le Brave, 1567, d'après le Miles gloriosus), d'Hésiode, de Pythagore... que par ses écrits personnels, il n'a cessé d'être fidèle au programme qu'il s'était proposé : Des Grecs et des Latins imitant l'excellence, / De vers et chants réglés décorer notre France.

Jean Antoine de Baïf meurt en 1589 à Paris.

— Hubert HARDT[...]

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