OUDRY JEAN-BAPTISTE (1686-1755)
Le nom de Jean-Baptiste Oudry est resté assez célèbre comme celui du meilleur peintre d'animaux au xviiie siècle. Il convient pourtant de ne pas négliger les autres aspects de sa carrière. Oudry fut le disciple de Largillière, lequel lui aurait conseillé de se spécialiser dans la peinture des animaux. Les leçons de cet enseignement ont profondément marqué Oudry. Ses portraits sont, en effet, tout proches de ceux de Largillière, avec la même rutilance dans les étoffes. Mais surtout l'art qu'il avait ainsi appris de rendre exactement le grain et, si l'on peut dire, la saveur de chaque objet allait faire de lui, non seulement un merveilleux peintre animalier, mais un auteur de natures mortes de tout premier plan.
Cette habileté fit d'Oudry une manière de peintre officiel. Sous un prince qui aimait la chasse autant que son prédécesseur aimait la guerre, Oudry se vit confier la commande de tentures importantes pour les Gobelins et Beauvais ; la plus fameuse est celle des Chasses de Louis XV, en huit pièces (1734-1745). Devenu surintendant de Beauvais, c'est lui qui appela Boucher à collaborer à la manufacture, et l'on a parfois l'impression que les animaux que Boucher peignait si bien doivent quelque chose aux leçons de l'ami Oudry.
L'art d'Oudry reste évidemment celui d'un décorateur. La postérité a mis les natures mortes de Chardin au-dessus des siennes, et même un étonnant tableau comme Le Canard blanc (1753, coll. Marquise de Cholmondeley, Londres) est apprécié surtout en tant que tour de force. Aucune œuvre ne montre mieux comment Oudry se place dans la lignée des peintres hollandais du xviie siècle ; un chandelier d'argent, une bougie, une feuille de papier portant sa signature, une serviette et une jatte de faïence pleine de crème entourent le canard mort ; tous ces objets sont blancs, l'art du peintre ayant consisté à donner à chacun sa consistance matérielle exacte, à l'intérieur d'une composition monochrome. Un art aussi subtil et aussi parfaitement conscient de ses moyens n'aura guère de successeurs ; quand Oudry meurt en 1755, sa place reste vide.
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Écrit par
- Georges BRUNEL : ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de lettres, conservateur des objets d'art des églises de la Ville de Paris
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