CALVIN JEAN (1509-1564)
L'organisation de la Réforme
Cependant, la situation politique de Genève avait changé : en 1540, les Guillermins avaient repris le dessus. Ils s'efforcèrent alors d'obtenir le retour de Calvin ; Farel lui écrivit à plusieurs reprises, mais il refusait : « Plutôt cent autres morts que cette croix sur laquelle il me faudrait mourir mille fois chaque jour. » Farel insista, alla même le voir à Strasbourg et Calvin lui reprocha « ses foudres avec lesquelles il tonne de si étrange façon ». Calvin cédera, écrivant à Farel (24 octobre 1540) : « Si le choix m'était donné, je ferais n'importe quoi plutôt que de t'obéir en cette affaire. Mais, comme je me souviens de ce que je ne m'appartiens pas, j'offre mon cœur comme immolé en sacrifice au Seigneur. » Tout l'homme est dans ce mot. Désormais il prit comme emblème une main qui offre un cœur. Il était lié par son obéissance à Dieu, dans un esprit de total sacrifice.
Pourtant il ne se hâte pas, et c'est seulement le 15 septembre 1541 qu'il remonte dans la chaire de Genève, reprenant sans transition l'explication de l'Écriture sainte à l'endroit où il l'avait laissée quatre ans plus tôt. Il est revenu avec la volonté de reprendre son œuvre de construction de l'Église, et son premier travail sera d'établir des Ordonnances et d'écrire un Catéchisme.
Les Ordonnances établissent les quatre ministères qui sont à la base de l'Église réformée : les pasteurs, les docteurs, les anciens et les diacres. Les pasteurs ont la charge de la prédication de la Parole et de l'administration des sacrements ; ils se réunissent chaque semaine en une « congrégation » pour l'étude de la Bible et pour les censures mutuelles. Les docteurs sont chargés de l'enseignement de la jeunesse. Les anciens sont les surveillants des membres de l'Église, chargés de la « cure d'âme » et de l'admission à la sainte cène ; il y avait douze anciens, se réunissant en consistoire, qui veillaient à ce que la table sainte ne fût pas profanée par la participation de personnes vivant notoirement dans le désordre, le manque d'amour fraternel ou l'incrédulité. Les diacres s'occupaient des malades et des pauvres et assuraient le service des hôpitaux ; c'est le fameux diaconat, qui montre la préoccupation sociale de la Réforme calviniste.
Le Catéchisme est écrit très rapidement en 1542. Beaucoup plus complet que celui de 1537, il se présente sous forme de questions et réponses. C'est un remarquable exposé doctrinal plutôt qu'une œuvre pédagogique. Divisé en cinquante-cinq chapitres, ce catéchisme était expliqué aux enfants et aux adultes chaque dimanche après le culte dominical.
Au même moment, Calvin fait paraître son Petit Traité de la sainte cène, où, en quelques pages très denses, il expose sa doctrine sur ce sacrement. Il s'efforce de réduire le désaccord qui s'était manifesté entre Luther et Zwingli, au colloque de Marbourg, en 1529. En voici la conclusion : « Nous confessons donc tous d'une bouche qu'en recevant en foi le sacrement selon l'ordonnance du Seigneur nous sommes faits vraiment participants de la propre substance du corps et du sang de Jésus-Christ... Cela se fait par la vertu secrète et miraculeuse de Dieu et l'Esprit de Dieu est le lien de cette participation, pour laquelle cause elle est appelée spirituelle. » Cette affirmation de la présence du Christ dans la cène aurait dû rassembler les membres désunis de la Réforme naissante. Ce ne fut pas le cas.
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Écrit par
- Jean CADIER : doyen honoraire de la faculté de théologie protestante de Montpellier
- André DUMAS
: pasteur, président du journal
Réforme
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