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CARZOU JEAN (1907-2000)

Le peintre Jean Carzou, de son vrai nom Garnik Zouloumian, est né dans une famille arménienne le 1er janvier 1907 à Moligt, près d'Alep (Syrie). Il est élevé en Égypte où il fait sa scolarité chez les Frères maristes puis au lycée français du Caire. Ses résultats scolaires lui permettent d'obtenir une bourse et de venir en 1924 à Paris où il s'installe définitivement. Inscrit à l'École spéciale d'architecture du boulevard Raspail, il s'intéresse surtout à la peinture et fréquente les Académies du quartier Montparnasse. C'est à partir de 1930 qu'il montre son travail, marqué par l'abstraction, dans les Salons qui se tiennent à Paris, les Indépendants, les Tuileries, le Salon d'automne. Les années suivantes, il peint des natures mortes, des paysages et des nus. Il gagne alors sa vie en faisant des caricatures d'hommes politiques pour la presse et en créant des dessins pour l'impression de tissus. C'est en 1939 qu'il a sa première exposition personnelle à la galerie Contemporaine, rue de Seine à Paris. Bien que d'autres accrochages de ses œuvres soient organisés en 1942, 1943 et 1944, son travail n'est vraiment remarqué qu'au lendemain de la guerre alors qu'il maîtrise à la perfection une vision et une technique personnelles. Récompenses, comme le prix Hallmark (qu'il reçoit en 1949), et expositions, en particulier à la galerie Drouant-David où il est entré en 1946, se succèdent alors. Le grand public découvre son univers visionnaire : l'exposition sur le thème de Venise (1953) obtient un immense succès comme un an plus tôt à l'Opéra de Paris les décors et les costumes pour Les Indes galantes de Rameau, première de ses nombreuses collaborations avec la scène parmi lesquelles Le Loup, un ballet de Roland Petit en 1953, Giselle pour l'Opéra de Paris en 1954, Athalie à la Comédie-Française en 1955, After Eden pour les ballets Harkness aux États-Unis en 1966, etc.

Sa production prolifique l'amène également à illustrer de nombreux ouvrages de bibliophilie – il faut citer Les Illuminations de Rimbaud, Au château d'Argol de Julien Gracq –, à exécuter des cartons de tapisseries comme L'Invitation au voyage pour la Manufacture nationale des Gobelins, ou encore à décorer des plats en céramique. Toutes ces techniques lui permettent de répéter à l'envi une construction de l'espace par grandes lignes enchevêtrées et hérissées de pointes acérées dont l'élan vertical inspirera à ses laudateurs des références injustifiées à la statuaire gothique ou aux peintres de l'École de Sienne, alors que sa sèche écriture, dont il ne déviera jamais, a tôt fait de précipiter son art vers un maniérisme stéréotypé. De la même façon, son utilisation d'une tonalité dominante pour les fonds – du noir au vert acide, du bleu jade au violet éclatant en passant par des monochromies d'orangé ou de larges coulées de rouge – conditionne pour partie le climat de ses compositions, sa maîtrise de l'art des camaïeux ne semblant obéir qu'à la froide logique commerciale qui s'est emparée de l'œuvre à partir des années 1960.

Marquée par les drames de la guerre, sa vision est tout d'abord ancrée dans l'angoisse des temps modernes, celle d'une obsession des grands cataclysmes et du saccage de la planète, puis elle se tempère de fantastique et d'étrangeté. Néanmoins, là aussi, les sujets inscrits dans le cycle de L'Apocalypse présenté à la galerie David et Garnier en 1957 – rails de chemin de fer, usines nucléaires, raffineries de pétrole, pylônes de haute tension, etc. – n'échappent pas à un graphisme qui n'exprime déjà plus que l'exploitation habile d'une manière, celle-là même dont témoignent de nombreuses séries : le [...]

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