JEAN CHRYSOSTOME (354 env.-407)
Avec Basile et Grégoire de Nazianze, ses aînés de quelques années, Jean Chrysostome (Jean « Bouche d'Or ») appartient à la génération de ceux qui édifièrent l'Église après les bouleversements doctrinaux et politiques qui suivirent l'avènement de l'Empire chrétien. La force de son verbe et la fougue de sa pensée lui ont valu d'être considéré comme l'orateur chrétien par excellence et le réformateur austère des mœurs. Jean Chrysostome fut avant tout un « apôtre » : il lutta contre toutes les déviations doctrinales qui menaçaient sa communauté, enseigna la « Bonne Nouvelle », s'attacha à définir les relations nécessaires entre l'appel à une vie spirituelle plus parfaite et le service de l'Église ; enfin, il chercha à insérer le message évangélique dans la vie sociale de son temps.
Un brandon de discorde
Né à Antioche dans une famille aristocratique chrétienne, Jean Chrysostome bénéficia d'une éducation raffinée qui lui permit d'assimiler à la fois la culture grecque et la doctrine du christianisme. Mais cette éducation fut surtout marquée par le fait qu'il appartenait à un milieu « contestataire ». Son enfance et son adolescence se déroulèrent dans la communauté religieuse animée par Mélèce, Diodore et Flavien, à une époque où les remous de la crise arienne étaient loin d'être estompés. Soumise aux vexations des partisans d'Arius, en rupture de communion avec les Églises orthodoxes d'Égypte et d'Occident, persécutée par l'empereur Julien, cette communauté était animée d'une foi intense. C'est ce qui explique que Jean Chrysostome ait pu assimiler des éléments de culture contradictoires tout en conservant une parfaite indépendance d'esprit. Ainsi, ses positions doctrinales non conformistes s'exprimeront en formules inattaquables en leur rédaction, ce qui lui évitera d'être censuré comme tous ses amis. Mais, désigné à cause de sa renommée pour occuper le siège le plus prestigieux de l'Empire d'Orient, Constantinople, en 397, il se rend vite indésirable au pouvoir civil et religieux ; déposé en 403 au « conciliabule du Chêne » et exilé une première fois, il demeure un brandon de discorde ; aussi essaie-t-on de l'éloigner toujours davantage. Rappelé à la suite d'un mouvement populaire, il ne tarde pas à être exilé de nouveau. Il meurt dans un fossé, à Cumana (Pont), en cours de déportation, ayant suscité autour de sa personne les haines les plus farouches et l'amour le plus passionné. Peu après sa mort, il sera réhabilité et placé au premier rang des pasteurs chrétiens.
La première démarche connue du jeune Chrysostome est la recherche intense de la communion avec Dieu par la contemplation et l' ascèse. À dix-huit ans, il abandonne les études profanes pour s'adonner à la vie spirituelle. Successivement moine, cénobite, anachorète, il se livre à des pratiques ascétiques excessives, mais n'en continue pas moins l'étude de l'écriture. C'est à la suite d'une crise de conscience longue et douloureuse qu'il comprend l'inanité du salut individuel recherché dans la fuite du monde ; il quitte sa solitude et vient se mettre au service de l'Église. Il est ordonné en 386. Jean Chrysostome conservera de cette expérience ascétique la ligne fondamentale de son message : le salut est communautaire, la vraie perfection se situe dans le service d'autrui ; la règle d'or du christianisme est de s'oublier soi-même pour penser aux autres. Il écrit alors son livre fondamental Sur le sacerdoce, où il expose les raisons de son choix et trace les principes de son action.
Jeune prêtre, Jean Chrysostome combat tous les adversaires de la communauté chrétienne. Sa connaissance de la diatribe le prédisposait à réussir dans l'art[...]
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Écrit par
- Jean-Marie LEROUX : ingénieur au C.N.R.S.
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