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DASTÉ JEAN (1904-1994)

Acteur et metteur en scène, Jean Dasté est un peu le pivot et le fil conducteur de trois générations qui ébranlèrent et continuent de révolutionner la tradition théâtrale française. Disciple et gendre de Jacques Copeau (sa compagne Marie-Hélène Dasté est une comédienne réputée), il réalisa, à force de courage, de ténacité et de talent, le vieux rêve de son maître : quitter Paris, ses habitudes et son conformisme, ses modes et ses anticonformismes, pour redonner vie à ce « désert culturel » qu'était devenue la province. Sa fille, Catherine Dasté, aborde de son côté d'une manière radicalement nouvelle le problème du théâtre pour la jeunesse, devenu pour beaucoup la pierre d'angle de l'édification d'un théâtre populaire. Pionnier de la décentralisation dramatique, Dasté entreprend, dès la Libération, de constituer une troupe à Grenoble puis à Saint-Étienne où il arrive en 1947. C'est le début d'un mouvement qui verra fleurir un peu partout les centres dramatiques itinérants, attirant un public nouveau et enthousiaste. Il aura fallu un travail patient et obstiné pour parvenir à ce résultat. Jamais la Comédie de Saint-Étienne, alors même que son directeur était considéré comme l'un des chefs de file du théâtre populaire, ne put disposer d'un vrai théâtre. Quand, sous la pression du mouvement suscité par la compagnie, la ville construira une maison de la culture, elle refusera d'en confier l'animation à Dasté et à son équipe. Pourtant, c'est à partir de Saint-Étienne que Dasté a fait grandir cette troupe vivante qui a joué où elle le pouvait, sous un chapiteau ou dans des salles de fortune, devant des auditoires d'abord squelettiques puis de plus en plus nombreux, la plupart des auteurs importants du répertoire national et international, les modernes comme les classiques. Beaucoup de comédiens sont passés chez lui, qui trouvaient là de nouvelles raisons d'exercer un métier difficile et captivant, partageant cette passion des grands metteurs en scène pour un théâtre pauvre de moyens mais riche de possibilités, n'hésitant pas à se faire régisseurs ou accessoiristes au cours de tournées épuisantes. Alors que ce premier effort de décentralisation semble avoir porté quelques fruits et que la relève est assurée par une nouvelle génération, Jean Dasté abandonne la direction de la Comédie de Saint-Étienne, en 1970, pour une nouvelle carrière de comédien au théâtre et au cinéma où on le retrouve, notamment sous la direction de Truffaut (L'Enfant sauvage, L'Homme qui aimait les femmes, La Chambre verte). Il y aura eu, entre le Dasté de Zéro de conduite et celui de Beau Masque, cette longue parenthèse, cette vie exemplaire qui trouve son image la plus juste dans le comédien chenu débarquant à l'improviste dans les bistrots de Saint-Étienne pour proposer aux consommateurs ahuris un impromptu de sa façon. « La culture, dit-il un jour, oui..., c'est peut-être le temps d'écouter. »

— Armel MARIN

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Écrit par

  • : metteur en scène, conseiller en éducation populaire et techniques d'expression

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