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DELAY JEAN (1907-1987)

De sa naissance à Bayonne le 14 novembre 1907 jusqu'à sa tétralogie généalogique Avant mémoire, en passant par l'Académie de médecine et l'Académie francaise, chaque moment de la vie de Jean Delay a fait l'objet d'enquêtes, de réflexions, et tout n'a suscité qu'admiration. Delay a-t-il pu vivre sereinement ce respect et cet enthousiasme quasi généralisés de la part d'hommes que ses succès n'ont sûrement pas manqué de déranger ?

Bachelier à quinze ans, externe des hôpitaux à dix-sept ans, interne à vingt ans, médecin des hôpitaux à trente ans et professeur de clinique à trente-neuf ans, il a parallèlement mené à bien une licence de philosophie, soutenu une thèse de lettres en 1942 et écrit trois romans : La Cité grise (Vigneau, 1946), Les Reposantes (Gallimard, 1947) et Hommes sans nom (Gallimard, 1948) qui montrent la sensibilité du médecin devant la maladie. À cet ensemble succède un texte qu'il réduit aux dimensions d'une nouvelle, « Lit numéro 7 », et qui retient l'attention de Gide. Entre l'auteur des Nourritures terrestres et le neuropsychiatre se noue une amitié, les deux hommes s'admirent. Ils se sont connus à Bruxelles en 1945 par Henri Mondor, et Gide lui fit rencontrer son ami Roger Martin du Gard. À la mort de l'auteur de L'Immoraliste et de La Porte étroite, sa fille communique tout naturellement ses papiers intimes, ses correspondances familiales au professeur Delay.

L'année 1952 représente une année importante, presque charnière, dans la vie de celui-ci : il entreprend une étude sur Gide. Mais c'est aussi en 1952 qu'il a l'idée, avec son collaborateur Pierre Deniker, d'appliquer la chlorpromazine (employée par Henri Laborit au Val-de-Grâce pour produire l'hibernation artificielle) au traitement de certaines maladies mentales, avec un plein succès. La chimiothérapie fait son entrée en psychiatrie.

L'introduction de ce produit bouleverse les habitudes thérapeutiques, démode l'électrochoc et abolit la camisole de force. Cette découverte conduira Delay en 1955 à l'Académie de médecine. Par ailleurs, en 1945, Delay, nommé expert au procès de Nuremberg, était chargé d'examiner Rudolph Hess et Julius Streicher. En 1947, il devint titulaire de la chaire de clinique des maladies mentales et de l'encéphale et directeur de l'Institut de psychologie ; et, en 1950, il présidait à Paris le premier congrès mondial de psychiatrie, qui réunissait deux mille cinq cents participants.

De l'impressionnante liste de ses œuvres scientifiques on ne peut donner qu'un très bref aperçu : en 1935, Les Astéréognosies, étude de la pathologie du toucher ; en 1941, Les Ondes cérébrales et la psychologie ; en 1942, Les Dissolutions de la mémoire, sa thèse de doctorat ès lettres avec une Préface de Pierre Janet ; en 1946, Les Dérèglements de l'humeur, avec une Préface de Gustave Roussy ; en 1950, Méthodes biologiques en clinique psychiatrique ; en 1953, Études de psychologie médicale ; en 1956, Aspects de la psychiatrie moderne...

Voilà bien des événements dans la vie d'un homme âgé d'à peine cinquante ans. En 1956, il se présente devant le public, littéraire cette fois – il l'avait un peu négligé depuis une dizaine d'années –, avec l'étude dont il avait conçu le projet en 1952 : une psychobiographie de Gide de 1 200 pages en deux volumes, André Gide avant André Walter et D'André Walter à André Gide. Le prix de la Critique lui est aussitôt attribué : il a créé un nouveau genre littéraire.

Mais Delay ne goûte pas la quiétude des gens satisfaits. Quiconque a bien lu son discours du 21 janvier 1960 à l'Académie française devrait s'en douter. En une phrase qui laisse deviner une profonde blessure, il confie aux Immortels qui le reçoivent[...]

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  • : docteur en linguistique, neurologue, médecin des hôpitaux

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