DIEUZAIDE JEAN (1921-2003)
Photographe français. Une carrière exceptionnelle, une œuvre d'une variété qui n'a d'égale que sa qualité, un engagement permanent pour promouvoir son art ont largement consacré Jean Dieuzaide (né à Grenade-sur-Garonne, en Haute-Garonne, en 1921 et mort à Toulouse en 2003) comme l'un des chefs de file de toute une génération d'hommes d'images en mal de reconnaissance.
Reporter à ses débuts, en 1944, il signe alors, du simple prénom Yan, un certain nombre d'images d'Espagne, du Portugal et bien entendu de France, devenues depuis lors de véritables icônes. Photographe d'architecture, à jamais marqué par l'art roman, qui lui donne à la fois la valeur des masses et le sens d'une organisation graphique révélatrice de l'essentiel, Jean Dieuzaide va également s'avérer bientôt un photographe industriel capable d'organiser le chaos pour lui conférer une beauté visuelle inattendue. Ses origines terriennes, qu'il n'a jamais omis de citer, lui permettent sans doute de communier avec la nature, en photographe de paysages toujours à l'écoute des chants de la terre, du ciel et des lumières. Lumières qu'il maîtrise tout autant dans de somptueuses natures mortes souvent mélancoliques que dans des images plus graphiques, expressives, aux compositions rigoureuses et raffinées.
Professionnel émérite et créateur à part entière, Jean Dieuzaide partage avec son aîné André Kertész le même credo : « Je suis un amateur et j'entends le rester toute ma vie. » Il n'a cessé de respecter cet engagement en confondant quotidiennement la photographie et sa propre vie. Très influencé par l'œuvre et par les écrits du photographe américain Minor White (1908-1976), il y trouve comme un écho à sa foi et la « possibilité, par le biais de la photographie, de trouver un chemin pour rendre hommage à la „Création“ et à „Dieu“ ». C'est sans doute ce qui explique a posteriori l'entreprise de longue haleine, commencée à la fin des années 1950, qu'il consacre à l'art roman. Ce travail exemplaire, exposé au musée des Augustins à Toulouse en 1960, puis au Pavillon de Marsan à Paris en 1962, aura une influence déterminante sur sa réflexion artistique.
Prix Niépce en 1955, il reçoit le prix Nadar en 1969, pour son ouvrage Catalogne romane (éd. du Zodiaque). Cependant, sa passion de la photographie n'a pas pour seul terrain d'expression celui de la prise de vue. Elle l'incite à être un véritable militant, présent dans tous les combats des années 1960 et 1970 qui auront permis de sortir la photographie de son anonymat. Jean Dieuzaide sera ainsi l'un des premiers compagnons des Rencontres internationales d'Arles, en 1970, après avoir été l'un des fondateurs du groupe Libre Expression dès 1964. Le but avoué de ces deux rassemblements est de faire évoluer la photographie, et d'imposer son langage en tant que média artistique. Le photographe sera surtout celui qui triomphera du désintérêt local (et national), en créant de toutes pièces, en 1975, ce qui deviendra l'une de ses plus belles réussites : la galerie municipale du Château-d'Eau à Toulouse. Cet espace d'exposition, toujours actif aujourd'hui, contribuera indubitablement à la naissance de nombre de galeries privées, à Paris et dans toute la France.
Le travail purement créatif de ce photographe-Protée, le premier à être admis peintre de la marine, en 1975, va évidemment pâtir, dans les années 1980, de son hyperactivité, et passer insensiblement au second plan, sans pour autant cesser d'exister. D'autant que la reconnaissance de son milieu pour l'œuvre réalisée vaut à Jean Dieuzaide de nombreuses expositions en France comme à l'étranger. En 1982, il est ainsi sélectionné parmi les dix-huit photographes illustrant [...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Jean-Claude GAUTRAND : photographe, journaliste, historien de la photographie
Classification
Autres références
-
PHOTOGRAPHIE (art) - Un art multiple
- Écrit par Hervé LE GOFF et Jean-Claude LEMAGNY
- 10 750 mots
- 20 médias
...l'Allemand Albert Renger-Patzsch, et en France les natures mortes d’Emmanuel Sougez comme les portraits de Daniel Masclet. Ainsi, les regards posés par Jean Dieuzaide sur un bac de goudron, par le Belge Robert Morian sur des végétaux, par Jean-François Malamoud sur les surfaces rocheuses aboutissent à...