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DUBUFFET JEAN (1901-1985)

« L'Hourloupe » et la « peinture expansée »

La longue liste des séries de la période matiériste se termine par Paris-Circus (1961-1962). Les couleurs vives et chatoyantes abondent, des personnages apparaissent dans un cadre qui n'est plus végétal ou minéral mais urbain, les tableaux se chargent d'enseignes de magasins populaires aux noms ironiques (comme dans Rue Passagère qui porte l'inscription « banque véreuse »). C'est aussi un moment de consécration pour Dubuffet : une rétrospective est présentée en 1960 au musée des Arts décoratifs à Paris et il se dote d'un secrétariat pour diffuser ses œuvres et pour leur assurer la postérité en réalisant, comme Picasso, un catalogue raisonné de l'ensemble de ses travaux.

Le cycle de L'Hourloupe (1962-1974) serait né de griffonnages au cours de conversations téléphoniques : des dessins de caractère automatique, tracés au stylo à bille sous forme de rayures rouges et bleues, couleurs qui seront dominantes durant tout le cycle. Les formes cellulaires laissent émerger de lointaines évocations anthropomorphes et l'écriture devient plus abstraite, une « sorte d'algèbre mentale unificatrice qui tend à représenter tous les faits du monde – objets, lieux et figures – dans une écriture uniforme », probablement inspirée par ses lectures de physique quantique. Le projet de Dubuffet n'est pas en effet de donner à voir le monde, mais de le déconstruire pour créer une nouvelle réalité composée par la projection de son univers mental.

À partir de 1966, le style de L'Hourloupe s'étend à la sculpture et à l'architecture grâce à la découverte d'un nouveau matériau : le polystyrène expansé. Dubuffet réalise ainsi des groupes monumentaux comme le Groupe de quatre arbres à la Chase Manhattan Bank à New York, la Closerie Falbala enchâssant le Cabinet logologique (1971-1976) à Périgny-sur-Yerres, Val-de-Marne, ou Bel Costumé installé au jardin des Tuileries en décembre 1998. Coucou Bazar (1971-1973) est le titre d'un ensemble de sculptures en ronde bosse, de panneaux sculptés et de costumes de théâtre agencés lors de spectacles présentés en 1973 à New York au Guggenheim Museum et à Paris au Grand Palais. Le seul effet narratif de ces « tableaux animés » était produit par des changements de décors, tandis qu'une dizaine d'acteurs évoluaient de façon quasi imperceptible. Tous ces projets de grande envergure obligeaient l'artiste à faire appel à des techniciens, à des ingénieurs ou à des architectes.

En 1974, Dubuffet introduit une nouvelle rupture dans son œuvre. Qu'il ait ressenti « un besoin de matérialité, un besoin de retour à la terre ferme » ou le désir de retrouver l'activité individuelle et artisanale de la création, il rompt le cycle de L'Hourloupe pour s'engager dans de nouvelles séries. La même année, il constitue une fondation dont le but est de présenter ses œuvres au public, de conserver ses projets et ses archives. À Paris, le secrétariat, au no 137 de la rue de Sèvres, regroupe ses archives et des salles où sont organisées des expositions consacrées à Dubuffet, tandis qu'à Périgny-sur-Yerres sont présentés des peintures, des sculptures, des maquettes d'architecture, l'ensemble Coucou Bazar et la Closerie Falbala, classée monument historique en novembre 1998.

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