GAYON JEAN (1949-2018)
Les travaux de Jean Gayon portent sur l’histoire et la philosophie des sciences du vivant. Depuis le mitan des années 1980, ils ont donné lieu à plus de trois cents publications préférentiellement consacrées à la théorie de l’évolution et à la génétique. Son champ de recherche premier a été et est demeuré le sillon darwinien de la théorie de l’évolution, depuis les premiers travaux de Darwin jusqu’aux prolongements actuels de la synthèse moderne. C’est à cette thématique qu’il a consacré sa thèse de philosophie, préparée sous la direction de François Dagognet à l’université Paris-I et soutenue en 1989. Dans ce travail, Gayon examine l’hypothèse de sélection naturelle et en particulier les liens complexes que celle-ci a entretenus dès le départ avec les modalités possibles de l’hérédité. Les trois volumes de la thèse ont constitué le matériau d’un livre publié en 1992 sous le titre Darwin et l’après-Darwin, une histoire de l’hypothèse de sélection naturelle. Unanimement reconnu comme un jalon majeur dans les études sur la théorie de l’évolution – y compris et peut-être même avant tout dans le monde anglo-saxon –, il donne à voir ce qui constitue la force et l’orientation des recherches de Gayon.
À l’intersection de la philosophie, l’histoire et la biologie
Tout d’abord, dans ses travaux, Gayon ne le cède en rien face à la technicité de certains savoirs biologiques. Cette volonté d’affronter la science dans ses dimensions les plus abstraites doit être mise en relation avec son parcours personnel. Après des études de philosophie à la Sorbonne, sanctionnées par l’obtention de l’agrégation en 1972, il s’engagea pendant près d’une décennie dans un cursus complet de biologie, tout en enseignant la philosophie en lycée. Il se forgea alors un sens aigu des questions biologiques dont il sut tirer profit tout au long de sa carrière.
Une autre particularité de son œuvre philosophique tient à l’attention toujours soutenue qu’il porte à l’histoire des sciences. Celle-ci n’est pas mobilisée simplement dans une perspective pédagogique, parce qu’elle faciliterait l’accès à une question philosophique. Gayon lui confère surtout la tâche d’être l’outil de révélation de la rationalité d’un champ du savoir. En cela, son orientation méthodologique tranche avec la philosophie de la biologie telle que cette discipline s’est internationalement constituée depuis le début des années 1980. En effet, la philosophie de la biologie, au travers par exemple de son principal journal, Biology and Philosophy, revendique l’indépendance vis-à-vis de l’histoire de la clarification conceptuelle.
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Écrit par
- Laurent LOISON : docteur en épistémologie et histoire des sciences, chargé de recherche au CNRS, professeur agrégé de sciences de la vie et de la Terre
Classification
Média