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JEANNENEY JEAN-MARCEL (1910-2010)

S'il fut, comme son père, ministre du général de Gaulle puis son premier ambassadeur dans l'Algérie indépendante, Jean-Marcel Jeanneney a été surtout un économiste. Agrégé de sciences économiques en 1936, professeur à la faculté de droit de Grenoble à vingt-sept ans, il en fut le doyen de 1947 à 1951 avant d'être professeur d'économie politique à Paris dès 1952. À la Fondation nationale des sciences politiques, il succéda à Charles Rist comme directeur du Service d'étude de l'activité économique ; homme politique pendant une dizaine d'années, il reprit ses cours de politique économique à Paris-I de 1970 à 1980. Analyste avisé des forces et faiblesses de l'économie française, il fonda et présida l'Observatoire français des conjonctures économiques de 1981 à 1989.

Jean-Marcel Jeanneney, né à Paris le 13 novembre 1910, marié à une avocate qui se consacra à leurs huit enfants, n'entra en politique que par devoir. Fils unique de Jules Jeanneney (1864-1957) – député, sous-secrétaire d'État à la Guerre de 1917 à 1920, président du Sénat –, il dirigea le cabinet de son père, ministre d'État du gouvernement provisoire de septembre 1944 à novembre 1945. Appelé par Charles de Gaulle au comité Rueff en 1958, il contribua à la réforme économique et financière qui se concrétisa par le nouveau franc et la libéralisation des échanges. Ministre de l'Industrie de 1959 à 1962, Jean-Marcel Jeanneney défendit la compétitivité française en Europe et le rééquilibrage des sources d'énergie entre thermique, hydraulique et nucléaire. Après avoir voulu la croissance des capacités françaises de raffinage et contribué à la naissance de l'Union générale des pétroles, ancêtre d'Elf, il engagea une réduction de la production charbonnière.

Nommé membre du Conseil économique et social en 1964, il fut ministre des Affaires sociales de 1966 à 1968 ; il créa l'Agence nationale pour l'emploi et soutint le projet d'assurances sociales pour les indépendants permettant d'atteindre une couverture maladie pour près de 98 p. 100 des Français.

Il s'éloigna de l'Union des démocrates pour la République (U.D.R.) peu après l'élection du président Pompidou, en démissionna en 1971 et consacra à l'évolution droitière de l'U.D.R. une réflexion lucide (À mes amis gaullistes, 1973). Il se retrouvait alors sur des positions proches de Christian Fouchet, qui affirmait en 1970 que « depuis ses origines, le gaullisme est l'ennemi du conservatisme ». Ce n'était pas un hasard si Charles de Gaulle, après avoir nommé Fouchet dernier haut-commissaire de France en Algérie, avait fait de Jeanneney l'ambassadeur haut représentant de la France près la République algérienne naissante, en poste du 6 juillet à décembre 1962. Le général jugea qu'il s'y débattit comme il pouvait et approuva qu'il plaide ensuite pour « la politique de coopération avec les pays en voie de développement ».

Élu en 1965 conseiller général de Rioz, au cœur de la Haute-Saône, et maire de sa ville de 1967 à 1989, il ne croyait pas « au gaullisme sans de Gaulle ». Dès 1974, il appela à voter Mitterrand sans états d'âme et devint, en 1981, le représentant personnel du nouveau président de la République pour la préparation du sommet du G7 à Ottawa. Il ne put donc que se réjouir quand son fils Jean-Noël fut nommé secrétaire d'État au commerce extérieur en 1991 et devint conseiller régional de Franche-Comté en 1992. Il publia à quatre-vingt-quatre ans Vouloir l'emploi et, deux ans plus tard, Écoute la France qui gronde (1996). Il y manifestait des soucis identiques à ceux qu'exprimait, dans les années 1960, Pierre Mendès-France qu'il avait battu aux élections législatives à Grenoble en juin 1968 : une[...]

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Écrit par

  • : docteur en études politiques et en histoire, ancien délégué-adjoint aux célébrations nationales (ministère de la Culture et de la Communication)

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