LE BRIS JEAN-MARIE (1817-1872)

Des progrès certains

Jean-Marie Le Bris perfectionne alors son appareil. Il a compris que le vol exige l’incidence variable des ailes – le gauchissement – et la déformation des extrémités de la voilure afin de déplacer le centre de gravité selon les besoins. La direction et la stabilité, comme la portance, dépendent de la manœuvre de leviers qui, par le biais de câbles disposés dans un jeu de 72 poulies, déplacent les ailes et leur donnent courbure et gauchissement. En changeant l'angle d'attaque des ailes face au vent relatif, le pilote modifie leur portance, fait ainsi monter ou descendre l’appareil, et peut en changer la direction. Ce mécanisme ingénieux fait donc de Le Bris l’inventeur du gauchissement de l’aile, bien avant les frères Wright qui se sont eux-mêmes inspirés des travaux du théoricien français Louis Mouillard.

Le Bris améliore son système sur L’Albatros IIen centralisant les commandes vers deux leviers verticaux, ancêtres du manche à balai, et en ajoutant une queue mobile, inspirée de celle des oiseaux. Les essais de ce nouvel appareil se déroulent sans pilote, en 1868, au polygone de la Marine, à Brest. Le Bris réussit la première tentative : le grand oiseau mécanique, tiré par une trentaine de marins mis à sa disposition, monte à une quarantaine de mètres et vole sur plus de 200 mètres, avant d’atterrir correctement. Malheureusement, à la seconde tentative, comme on lui a interdit de prendre place à bord et qu’il ne peut donc manœuvrer l’appareil – que les marins font voler à la manière d’un cerf-volant –, une chute brutale anéantit le prototype, de même que les espoirs de Le Bris qui, le 28 mars 1868, apprend la mort de son fils, à Montevideo.

Marqué par les deuils et les revers, Le Bris participe néanmoins à la guerre de 1870, comme engagé volontaire. Après l’armistice, de retour à Douarnenez, soucieux de contribuer au maintien de l’ordre, il accepte la charge d’agent de police. Pendant la nuit du 7 septembre 1871, alors qu’il intervient dans une bagarre à la sortie d’un bal, il est roué de coups et laissé inconscient. Il parvient à regagner son domicile, mais son état empire et il succombe à ses blessures le 17 février 1872 dans cette même ville de Douarnenez.