CHARCOT JEAN-MARTIN (1825-1893)
Le théâtre des consultations et la gloire de Charcot
Charcot fut aussi un grand pédagogue lors de ses leçons cliniques du vendredi matin en amphithéâtre, très préparées autant dans leur contenu que dans leur exposition orale affranchie de la lecture. Malgré sa timidité, après la démonstration effectuée sur le cas d’une patiente, Charcot n’hésitait pas à mimer celle-ci, à dessiner au tableau noir des schémas anatomiques, et à commenter parfois des projections de photographies de son service. Le théâtre de ces leçons du vendredi était bien, à n’en pas douter, une forme de pédagogie.
Une tout autre forme de pédagogie présidait aux leçons du mardi, selon une distinction qu’on retrouve chez Claude Bernard entre ses cours dogmatiques en Sorbonne et ceux, plus libres, au Collège de France, dévoilant la « science en marche ». Charcot présentait alors quelques cas choisis de patientes qu’il présentait publiquement en consultation externe afin de montrer l’art du diagnostic en direct et celui de la thérapeutique, tout en discutant de certaines idées générales personnelles. L’assistance publique lui avait même permis d’ouvrir des lits supplémentaires pour cette nouvelle forme d’enseignement très appréciée et qui donna lieu à des publications, même si elle fut aussi comparée à un théâtre grossier lorsque Charcot suscitait par suggestion des crises d’hystérie chez ses patientes au cours de ses séances.
Les consultations externes privées ou publiques de Charcot lui valurent des sollicitations médicales de la part de personnalités de notoriété internationale, comme l'empereur du Brésil, la reine d'Espagne et certains grands-ducs de Russie. Ne se mêlant pas de politique, mais ami à la fois de Gambetta et du grand-duc Nicolas de Russie, il organisa cependant à leur demande une entrevue non officielle dans sa villa de Neuilly-sur-Seine, ce qui peut être mis en parallèle des actions de Louis Pasteur dans les relations France-Russie. Charcot accepta aussi des invitations à l’étranger pour des conférences. Il fréquenta ainsi toute l’Europe y compris la Russie, mais aussi l’Afrique du Nord, et participa régulièrement aux congrès de la British Medical Association.
Son enseignement eut également un vif succès international qui attira nombre d’élèves étrangers dans son service, parmi lesquels le Russe Vladimir Bechterev, le Roumain Georges Marinesco, le Viennois Sigmund Freud... À la fin de sa carrière, au sommet de sa gloire, célébré au Congrès international de médecine de Londres de 1881, Charcot avait acquis une fortune colossale en plus de celle de son épouse. Il put acquérir l’hôtel particulier parisien de Varengeville, au 217 boulevard Saint-Germain à Paris. Il y recevait ses élèves et certaines célébrités. À sa mort, ses élèves et collègues étrangers contribuèrent pour moitié à la somme collectée de la souscription pour ériger sa statue, qui sera fondue par les Allemands en 1942.
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Écrit par
- Jean-Gaël BARBARA : neuroscientifique, directeur de recherche CNRS
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