Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

BERTHELOT JEAN-MICHEL (1945-2006)

Né en juin 1945, Jean-Michel Berthelot suit un brillant parcours qui le conduit à l'École normale supérieure (1966-1970) puis à l'agrégation de philosophie (1970), avant de débuter une carrière de professeur de philosophie au lycée de Cahors (1972-1979). Sa carrière prend toutefois une tournure différente à la fin de la décennie de 1970 lorsqu'il découvre la sociologie au contact de Raymond Ledrut, qui anime alors la sociologie à l'université de Toulouse. Il soutient sous la direction de celui-ci un doctorat d'État en sociologie en 1980. Dès lors, sa carrière sera celle d'un enseignant-chercheur en sociologie, à Toulouse puis à Paris : assistant de sociologie (1979-1981), il est élu professeur de sociologie à l'université de Toulouse-Le Mirail (1981-1997) puis aux universités de Paris-V-René-Descartes (1997-2002) et de Paris-IV-Sorbonne (de 2002 à sa mort).

Sa formation philosophique lui avait transmis le goût de l'écriture exigeante, de la rigueur analytique et de la discussion conceptuelle. Son esprit d'ouverture et sa curiosité le protégeaient de tout enfermement dans un système théorique unique ou dans un paradigme trop clos – au risque d'apparaître comme trop consensuel. Simultanément, sa croyance dans la possibilité de bâtir une science du social l'empêchait de se résoudre au relativisme ou au cynisme institutionnel. Ces deux aspects se reflètent bien dans son œuvre, caractérisée par un refus du relativisme et du réductionnisme ainsi que par la recherche d'un « pluralisme explicatif sous contrainte », c'est-à-dire l'association d'une pluralité des descriptions sociologiques et d'un monisme ontologique autorisant la comparaison des systèmes explicatifs. Son premier ouvrage, Le Piège scolaire (1983), issu de sa thèse de doctorat d'État, en est une bonne illustration : Berthelot y conduit une analyse critique des deux grands modèles explicatifs de la reproduction scolaire (incarnés dans les travaux de Pierre Bourdieu, d'une part, et de Raymond Boudon, d'autre part) pour chercher une voie alternative.

Après une première période centrée sur la sociologie de l'éducation et divers textes consacrés à la sociologie du corps, ses travaux ont porté sur l'histoire de la sociologie, sur l'épistémologie des sciences sociales et sur la sociologie de la connaissance scientifique. C'est incontestablement dans ces domaines que ses talents se sont le plus clairement et durablement exprimés. S'écartant de l'histoire événementielle ou légitimatrice comme de l'histoire des idées, ses recherches en histoire de la sociologie visaient à appréhender les programmes d'analyse sociologique dans leur constitution et leur développement historique (La Construction de la sociologie, 1991 ; Durkheim, l'avènement de la sociologie scientifique, 1995). Dans le domaine de l'épistémologie des sciences sociales, il a cherché à saisir les modalités de la constitution de la connaissance en sciences sociales ainsi qu'à expliciter leurs divers schèmes d'intelligibilité et programmes de recherche (L'Intelligence du social, 1990 ; Les Vertus de l'incertitude, 1996 ; La Sociologie. Épistémologie d'une discipline, 2000 ; Épistémologie des sciences sociales, 2001). Ses derniers travaux se sont inscrits dans le domaine de la sociologie de la science et spécifiquement de la connaissance scientifique. Si la maladie n'était pas venue interrompre sa vie et son œuvre, il aurait probablement poursuivi le chemin ouvert dans Les Sciences : institutions, pratiques, discours (2000), Figures du texte scientifique (2003), Savoirs et savants. Les études sur la science en France (avec Olivier Martin et Cécile Collinet, 2005), L'Emprise du vrai (2007). Ce chemin, ambitieux, était celui de la recherche d'un[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : maître de conférences en sociologie et chercheur au Centre de recherche sur les liens sociaux, C.N.R.S. et université de Paris-V-René-Descartes

Classification

Autres références

  • ÉPISTÉMOLOGIE DES SCIENCES SOCIALES (dir. J.-M. Berthelot) - Fiche de lecture

    • Écrit par
    • 920 mots

    Voici un livre collectif (Presses universitaires de France, 2001) dont la hauteur des vues développées, la qualité de l'information et l'organisation de l'argumentation peuvent intéresser un vaste public. S'il faut souligner l'opportunité de sa parution, c'est en raison du moment crucial traversé...