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MONNET JEAN (1888-1979)

À l'origine du Conseil européen

La dernière action importante menée par Jean Monnet pour la construction de l'Europe fut l'institution du Conseil européen, réunissant trois fois par an les chefs d'État ou de gouvernement des pays membres des Communautés européennes et le président de la commission. L'utilité de telles réunions au sommet était apparue avec la conférence de La Haye (déc. 1969) et la conférence de Paris (oct. 1972). Mais celles-ci n'étaient pas organisées de façon régulière. Jean Monnet estimait qu'il fallait les institutionnaliser afin de donner une impulsion politique véritable aux Communautés dont les mécanismes institutionnels avaient perdu de leur efficacité avec le développement de la bureaucratie, l'abus de la technicité et l'exigence de l'unanimité pour la plupart des décisions. Alors que son comité d'action s'était appuyé sur les partis politiques et les syndicats, il apparaissait désormais nécessaire – compte tenu de la marginalisation du Parlement européen à cette époque – de concentrer l'influence sur les chefs de l'exécutif et de leur demander de prendre la responsabilité directe des problèmes européens. D'autant qu'au sommet de Paris d'octobre 1972, ils s'étaient engagés à mettre sur pied l'Union économique et monétaire et l'Union européenne pour 1980.

Dès 1973, Jean Monnet élaborait un projet de « gouvernement européen provisoire » composé des neuf chefs d'État ou de gouvernement et prenait contact avec Edward Heath, Premier ministre britannique, Willy Brandt, chancelier d'Allemagne fédérale et Michel Jobert, ministre français des Affaires étrangères, très proche du président Pompidou. Ce dernier proposa à ses partenaires des réunions régulières. Le sommet de Copenhague, en décembre 1973, fut convoqué dans cet esprit, mais la crise pétrolière le condamna à l'échec. En 1974, Jean Monnet reprit ses efforts auprès des nouveaux responsables politiques : Harold Wilson, Helmut Schmidt et Valéry Giscard d'Estaing. Le nouveau président de la République française réagit très favorablement. Il convoqua à Paris en décembre 1974 un dernier sommet au cours duquel les chefs de gouvernement décidaient d'une part l'élection au suffrage universel du Parlement européen, d'autre part la création du Conseil européen qui a permis d'incontestables progrès dans le règlement de problèmes communautaires et le développement de la coopération politique.

Après ce succès, Jean Monnet mit fin à l'activité du comité d'action pour les États-Unis d'Europe, le 9 mai 1975, et consacra ses dernières forces à la publication de ses Mémoires. « Nous ne coalisons pas des États, nous unissons des hommes » : telle est la formule par laquelle il définissait la méthode qu'il avait employée durant toute sa vie. Transmettre cette leçon était apporter son ultime contribution à la construction européenne.

— Pierre GERBET

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Jean Monnet, 1947 - crédits : Bert Hardy/ Getty Images

Jean Monnet, 1947

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