MOULIN JEAN (1899-1943)
Serviteur de la République, préfet et chef de cabinet de plusieurs ministères dans les années 1930, Jean Moulin se convertit à un gaullisme de raison et de circonstance après sa rencontre avec le général en octobre 1941. Il devient le délégué de celui-ci en France, organisant les structures clandestines, renforçant les mouvements, intégrant les partis, donnant ainsi, au sein de la Résistance française, une légitimité supplémentaire à la France libre installée à Londres. Ses actions de coordination des réseaux aboutissent à la création du Conseil national de la Résistance en mai 1943, qu'il ne préside que brièvement, puisqu’il est arrêté par la Gestapo de Lyon le 21 juin suivant. Même si Jean Moulin fait l'objet de polémiques depuis les années 1950, son entrée au Panthéon, en 1964, l'a élevé au rang de héros national, incarnation même de la Résistance.
Jean Moulin, préfet
Jean Moulin est né le 20 juin 1899 à Béziers, dans une famille de militants républicains. Son père, franc-maçon, professeur et conseiller général radical-socialiste, l'incite à entrer dès l'âge de dix-huit ans dans l'administration préfectorale. Il met ensuite à profit ses relations dans le monde politique pour favoriser la carrière de son fils.
Après une courte mobilisation à la toute fin de la Première Guerre mondiale, Jean Moulin débute comme attaché au cabinet puis sous-chef de cabinet du préfet de l'Hérault (1917). Il est tour à tour chef de cabinet du préfet de la Savoie (1922), sous-préfet d'Albertville (plus jeune sous-préfet de France, 1925), de Châteaulin (1930), de Thonon (1933), secrétaire général de la préfecture de la Somme (1936), préfet de l'Aveyron (plus jeune préfet de France, 1937), puis d'Eure-et-Loir (1939).
Son amitié avec Pierre Cot, jeune et brillant député radical, lui ouvre la porte des cabinets ministériels. À plusieurs reprises, il est chef de cabinet de Cot, au secrétariat d'État aux Affaires étrangères (1932), au ministère de l'Air (1936), puis du Commerce (1938). En tant que chef de cabinet du ministre de l'Air du Front populaire, à partir de l'été de 1936, il prend part aux livraisons clandestines d'armes et d'avions au gouvernement républicain lors de la guerre d'Espagne.
La réputation du préfet Jean Moulin auprès de son ministère de tutelle est celle d'un excellent administrateur, à tel point que le ministre de l'Intérieur du gouvernement formé le 17 juin 1940 par le maréchal Pétain à la suite de la demande d'armistice, envisage de le nommer directeur de la Sûreté. Projet abandonné lorsqu'on apprend son arrestation le soir même par le commandant allemand qu'il a dû accueillir dans sa préfecture de Chartres. Pour échapper aux brutalités qui lui sont infligées dans le but de lui faire avaliser un texte raciste et mensonger à l'égard des troupes coloniales, Jean Moulin tente de se suicider dans la nuit du 17 au 18 juin 1940. Soigné, libéré, il reprend ses fonctions à la tête de son département occupé, faisant preuve d'opiniâtreté tant à tenir tête aux Allemands et à protéger ses administrés qu'à remettre son département en état de marche. En vertu de ses opinions de gauche et de sa personnalité marquée, il est révoqué par le maréchal Pétain et quitte l'administration le 16 novembre 1940.
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Écrit par
- Daniel CORDIER : historien, ancien secrétaire de Jean Moulin
- Bénédicte VERGEZ-CHAIGNON : docteure en histoire
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
Classification
Média
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