JEAN NÉPOMUCÈNE saint (1330 env.-env. 1393)
Un récit en honneur au xviiie siècle raconte que Jean dit Népomucène naquit à Pomuk ou Népomuk en Bohême. Ses parents étant âgés, sa naissance fut miraculeuse. Très pieux, il fit de solides études qu'il couronna à Prague par les doctorats en théologie et en droit canon. Après un mois passé dans la prière, il fut ordonné prêtre et désigné comme prédicateur de l'église du Tyn à Prague. Il eut tant de succès qu'il fut nommé chanoine de la cathédrale. Devant le roi Venceslas, il prêcha contre les désordres de la Cour ; il fut cependant choisi comme aumônier. Le roi se montrant de plus en plus méchant, la reine Jeanne, très malheureuse, se confia à Jean Népomucène devenu son confesseur. Le souverain en prit ombrage et voulut connaître les péchés que la reine avouait. Jean refusa de les révéler. Jeté dans un cachot et torturé, il ne céda pas. Libéré sur l'intervention de la reine, il se rendit au célèbre pèlerinage de Stara Boleslav ; comme il rentrait à Prague sur le soir, Venceslas l'aperçut de la fenêtre de son château ; il l'appela, voulut encore lui faire révéler les confessions de la reine ; voyant l'inutilité de ses menaces, le roi le fit jeter du haut d'un pont dans la Vltava, à la nuit tombée, le 16 mai 1383.
Pourtant, aucun document contemporain ne fait allusion à cette édifiante histoire, alors que des sources abondantes et sûres font connaître un Jean de Pomuk qui, né dans le village de ce nom entre 1340 et 1346, fut notaire public en 1370 et attaché à la curie archiépiscopale de Prague en 1373. Ordonné prêtre probablement en 1379, il devint curé de Saint-Gal de Prague. Il se mit alors à étudier le droit canon. Bachelier en 1381, il fut étudiant à Padoue de 1383 à 1387. En 1390, il échangea sa cure, où il n'avait jamais exercé aucune fonction, contre l'archidiaconé de Zatec, cumulant avec cette charge deux bonnes prébendes. En mai 1393, Jean de Pomuk accompagna chez le roi Venceslas IV l'archevêque Jean de Jenstejn. Pour un motif qu'on ignore, le roi entra dans une violente colère. Aidant lui-même le bourreau, il mit à la torture trois assistants de l'archevêque. Deux s'en tirèrent sans trop de mal ; le troisième, Jean de Pomuk, en mourut. On se débarrassa de son cadavre en le jetant dans la Vltava.
Faut-il supposer que deux Jean de Pomuk ont été assassinés par le même roi et jetés dans la Vltava, l'un en 1383, l'autre en 1393 ? C'est invraisemblable. Il n'y en eut qu'un, qui mourut en 1393, mais comme cette date rendait impossible l'épisode de la reine Jeanne, morte en 1387, on avança sa mort de dix ans. Pour l'opposer au trop populaire Jean Hus, brûlé à Constance en 1415 (et qui, lui, avait vraiment été confesseur de la reine), les prédicateurs de la Contre-Réforme catholique exaltèrent ce Jean Népomucène, qu'ils considéraient, sans doute de bonne foi, comme martyr du secret de la confession, point essentiel de la discipline catholique. Benoît XIII canonisa Jean Népomucène en 1729. Sa statue fut érigée sur de nombreux ponts en Europe centrale.
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Écrit par
- Jacques DUBOIS : moine bénédictin, directeur d'études à l'École pratique des hautes études (IVe section)
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Autres références
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PRAGUE
- Écrit par Encyclopædia Universalis , Marie-Claude MAUREL et Victor-Lucien TAPIÉ
- 5 215 mots
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...recevaient beaucoup de son imagination et de toute son atmosphère. Par exemple, l'opinion, sans distinction de classes, s'enflamma pour le culte de saint Jean Népomucène (canonisé en 1729 ; sarcophage d'argent à Saint-Guy, 1736). Nobles, bourgeois, menu peuple, Allemands ou Tchèques, se sentaient associés... -
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