BELMONDO JEAN-PAUL (1933-2021)
Acteur avant tout
Le succès est foudroyant, et Belmondo montre très vite l'étendue de son registre. Il surprend dans le rôle inattendu de Léon Morin, prêtre (Jean-Pierre Melville, 1961), que peu d'autres auraient su rendre aussi crédible, sobre et émouvant. Il passe de l'avant-garde littéraire (Moderato cantabile, Peter Brook, d'après Marguerite Duras, 1960) aux grands drames italiens (La Viaccia, Mauro Bolognini, et La Ciociara, Vittorio De Sica, 1960) et au pur divertissement (Cartouche, Philippe de Broca, 1962). L’association logique entre la jeune vedette ascendante et l’ex-héros mythique des années 1930 (Pépé le Moko, La Bandera...) devenu seigneur et patriarche du cinéma français d’après-guerre (Le Baron de l’écluse, Les Grandes Familles, Le Président...) donne Un singe en hiver (Henri Verneuil, 1962), d’après le roman éponyme d’Antoine Blondin. Le film se place sous l’égide de l’amitié et de la boisson, avec des scènes de beuverie devenues cultes. Pourtant peu commode, Gabin s’adresse au réalisateur, Henri Verneuil : « Vous ne me direz plus : Ah, si j’avais un Gabin jeune ! Eh bien, vous l’avez ! »
La nouvelle vague utilise aussi Belmondo à contre-emploi, ainsi Truffaut dans La Sirène du Mississippi (1969) ou Chabrol dans Docteur Popaul (1972), tandis que Godard prolonge son personnage romantique, violent et désespéré dans un autre film devenu mythique, Pierrot le fou (1965).
Belmondo interprète les premiers films de Jean Becker ou Marcel Ophüls et trouve avec Melville quelques-uns de ses plus beaux rôles (Le Doulos, 1962 ; L'Aîné des Ferchaux, 1963). Comme producteur (Cerito Films) et acteur, il sait risquer gros et perdre sans amertume (Stavisky, Alain Resnais, 1974). Il va donner peu à peu le sentiment de gérer bourgeoisement sa carrière comme son personnage, capitalisant ses acquis sous la direction de Philippe de Broca – de L'Homme de Rio (1964) et autres Tribulations d’un Chinois en Chine (1965) à L'Incorrigible (1975) –, de Verneuil (Cent Mille Dollars au soleil, 1964), de Georges Lautner, de Gérard Oury, Jean-Paul Rappeneau, Jacques Deray, Claude Lelouch ou Philippe Labro... Ses cascades non doublées renforcent sa notoriété auprès du public.
L’acteur remonte aussi sur les planches avec succès, en 1987 dans Kean, en 1990 dans Cyrano de Bergerac… et dirige le Théâtre des Variétés à Paris. En 1988, Itinéraire d’un enfant gâté, de Claude Lelouch, est son dernier grand succès au cinéma et lui vaut l’attribution d’un césar du meilleur acteur. Une chance sur deux (Patrice Lecomte, 1998), reconstitution du couple Delon-Belmondo qui avait triomphé en 1970 (Borsalino, Jacques Deray), est un échec, tout comme Amazone (2000), le dernier film qu’il tourne avec son complice de Broca. En 1999, dans Peut-être de Cédric Klapisch, son double rôle de fils et grand-père du héros (Romain Duris) surprend sans convaincre.
En 2001, Jean-Paul Belmondo est victime d’un accident vasculaire cérébral qui l’immobilise longuement. Il tourne pourtant un remake du classique Umberto D. de Vittorio De Sica, Un homme et son chien (Francis Huster), qui sort en 2009 et ne vaut que par sa présence. En 2016, il publie, avec le soutien de son fils Paul, ancien pilote automobile et acteur, des mémoires (Mille vies valent mieux qu’une) et un livre de photos-souvenirs (Belmondo par Belmondo). En 2011, le festival de Cannes lui décerne une palme d’honneur pour l’ensemble de sa carrière, et la cérémonie des césars 2017 lui est dédiée en sa présence.
Jean-Paul Belmondo meurt à Paris le 6 septembre 2021.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Joël MAGNY
: critique et historien de cinéma, chargé de cours à l'université de Paris-VIII, directeur de collection aux
Cahiers du cinéma - Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
Classification
Média
Autres références
-
BECKER JEAN (1933- )
- Écrit par René PRÉDAL
- 650 mots
Jean Becker est, dans les années 1950, l'assistant de Julien Duvivier, Henri Verneuil ainsi que de son père Jacques Becker. Il dirige même des plans de l'œuvre ultime de ce dernier, Le Trou (1960) dont il supervise le montage, le film n'étant sorti qu'après la mort de son auteur. Comme...