BERTAUD JEAN-PAUL (1935-2015)

Historien français, spécialiste de la Révolution française et de l’Empire, Jean-Paul Bertaud est né le 2 août 1935 à Soissons (Aisne) et mort le 21 novembre 2015 à Paris.

D’abord élevé dans une famille de l’ouest de la France, elle-même marquée par les divisions de la période révolutionnaire, il part avec sa mère en Algérie après la mort de son père à la Libération. Au début des années 1950, la famille s’installe à Paris et Jean-Paul Bertaud passe son baccalauréat au lycée Voltaire.

Lors de ses études d’histoire à la Sorbonne, il rencontre l’historien de la Révolution française Marcel Reinhard, qui dirigea ses premiers travaux de recherche sur les journaux et journalistes royalistes, puis sa thèse intitulée La Révolution armée : les soldats-citoyens et la Révolution française, publiée en 1979 (Robert Laffont), marquée par les méthodes de l’histoire sociale et quantitative et les premiers apports de l’informatique en histoire. Si Jean-Paul Bertaud s’engagea d’abord dans l’enseignement secondaire notamment à Creil (Oise), il ne tarda pas à rejoindre l’Université. Pendant toute sa carrière de chercheur, menée comme maître-assistant (1967) puis professeur (1989) à l’université de Paris-I- Panthéon-Sorbonne, il se consacra aux champs de l’histoire sociale de la presse et de l’armée, témoignant d’une étonnante continuité intellectuelle pendant presque quarante ans.

Prolongeant sa thèse par des articles et livres sur les soldats, l’armée et la guerre (dont Guerre et société en France de Louis XIV à Napoléon I^er, Armand Colin, 1998), Jean-Paul Bertaud a aussi publié de nombreuses études sur le monde de la presse (Les Amis du roi :journaux et journalistes royalistes en France de 1789 à 1792, Perrin, 1984, ouLa Presse et le pouvoir de Louis XIII à Napoléon I^er, Perrin, 2000). Auteur de manuels, mais aussi de nombreux ouvrages destinés à un public plus large (C’était dans le journal pendant la Révolution française, Perrin, 1988 ; Initiation à la Révolution française, Perrin, 1989), Jean-Paul Bertaud fut au centre d’un vaste réseau d’institutions et de chercheurs. Fondateur du Centre d’histoire militaire de l’université Paris-I-Panthéon-Sorbonne, professeur associé aux écoles militaires de Saint-Cyr-Coëtquidan, il s’est aussi signalé par ses travaux sur la période révolutionnaire : président de la Société des études robespierristes (de 1990 à 1999), directeur des Annales historiques de la Révolution française (1993-1999), il collabora aussi avec les chercheurs de l’Institut d’histoire de la Révolution française. Certes moins connu qu’Albert Soboul ou Michel Vovelle, il a néanmoins renouvelé la vision de la presse et de l’armée de la période révolutionnaire, étudiées à travers les perspectives de l’histoire sociale et culturelle, mais aussi de l’anthropologie.

Jean-Paul Bertaud fut aussi un historien du Consulat et de l’Empire : se distinguant d’une historiographie encore parfois fascinée par la figure de Napoléon, il a consacré beaucoup de livres à cette période, de Bonaparte et le duc d’Enghien :le duel des deux France (Robert Laffont, 1972) à L’Abdication : 21-23 juin 1815(Flammarion, 2010).

Soulignant les continuités (Le Premier Empire, legs de la Révolution, PUF, 1973) sans esprit de manichéisme, Jean-Paul Bertaud savait traverser les périodes et s’affranchir des frontières qui segmentaient, jusqu’à la fin de la guerre froide, les études révolutionnaires. Cet esprit d’ouverture, il l’a lui-même résumé en 1988, évoquant avec humour le métissage politique de ses origines familiales : « Élevé en pays chouan par une aïeule royaliste et par une mère de sensibilité républicaine, une sorte de fracture s’est établie dans mon esprit. Qui fallait-il croire : la parole de l’Ami du Roi ou celle de l’Ami du Peuple ? […] Adulte, j’ai été conduit à rédiger une thèse sur[...]