DEMOULE JEAN-PAUL (1947- )
Quelle place pour l’archéologie dans la société ?
C’est dans le cadre de son enseignement à l’université de Paris-I à partir de 1992, où il est professeur de protohistoire – un poste qu’il occupera jusqu’à sa retraite en 2016 –, que Jean-Paul Demoule estcoauteur d’un Guide des méthodes de l’archéologie, aux côtés d’Alain Schnapp, François Giligny, et Anne Lehoërff. Au cours de ces années d’enseignement, il publiera plusieurs ouvrages consacrés au Néolithique, dont La Révolution néolithique en France (2007) et Les Origines de la culture : la révolution néolithique (2013).
En 1998, la ministre de la Culture Catherine Trautmann confie à un groupe de travail composé de Jean-Paul Demoule, Bernard Pêcheur, conseiller d'État, et Bernard Poignant, maire de Quimper, le soin de réfléchir à une nouvelle loi de protection du patrimoine archéologique face aux risques liés aux aménagements du territoire. La loi de janvier 2001 sur la création de l’INRAP est le produit de cette réflexion. Dans le cadre de sa présidence, Jean-Paul Demoule va coordonner et publier de nombreux ouvrages sur la place de l’archéologie préventive dans la société contemporaine et son apport pour la compréhension du passé : La France archéologique, vingt ans d’aménagements et de découvertes (2004), La Fabrique de l’archéologie en France (avec Christian Landes, 2009), et plus récemment (2018) en collaboration avec Dominique Garcia, actuel président de l’INRAP, et Alain Schnapp, Une histoire des civilisations.
Jean-Paul Demoule s’intéresse également aux usages idéologiques de l’archéologie, aux rapports entre archéologie, linguistique, patrimoine et identités, ainsi qu’àl’utilisation politique de l’archéologie dans le cadre des constructions identitaires et raciales modernes. Il aborde notamment la question des origines de la France et du roman national dans On a retrouvé l’histoire de France (2012). Dans cet ouvrage, d’Homo erectusaux Guerres mondiales, il brosse le portrait bariolé et buissonnant de l’histoire du territoire national par le prisme de son patrimoine archéologique, entre migrations, métissages, hybridations et rencontres de l’autre. Il s’intéresse par la suite à la question du « paradigme indo-européen » dans Mais où sont passés les Indo-Européens ? Le mythe d’origine de l’Occident (2014). Dans ce long essai, il revient sur les conditions d’élaboration de la figure du « peuple indo-européen » au début du xxe siècle et sur les dérives idéologiques orchestrées à ce sujet pour installer des politiques raciales fondées sur l’archéologie préhistorique. Revenant sur les modèles explicatifs traditionnels, il y défend l’idée qu’il n’y a pas nécessairement de coïncidence absolue entre culture matérielle, ethnicité, langue et qu’il n’existe ni foyer unique au « peuplement indo-européen » originel, ni trajectoire unique, sous la forme d’un arbre se ramifiant de proche en proche, pour expliquer les origines des langues indo-européennes. Il soutient à la place la pertinence des modèles portant sur la créolisation pour expliquer les ressemblances conceptuelles, phonétiques et grammaticales qui existent entre langues appartenant au groupe indo-européen.
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Écrit par
- Clément SALVIANI : professeur agrégé d'histoire, attaché temporaire d'enseignement et de recherche en histoire ancienne, doctorant en archéologie
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