CASSEL JEAN-PIERRE (1932-2007)
Année 1950 : un film dans lequel Jacques Hélian et son orchestre tiennent la vedette, Pigalle Saint-Germain-des-Prés, marque la première apparition de Jean-Pierre Cassel à l'écran – il y incarne un danseur de be-bop dans les caves alors fameuses...
Né à Paris, élève du cours Simon, il va multiplier les apparitions tout au long de la décennie, selon le parcours hiérarchisé de l'époque : figuration dite « intelligente », puis petits rôles... jusqu'à l'accession au vedettariat. On l'aperçoit notamment en jeune trompettiste, au côté de Brigitte Bardot, dans En cas de malheur (1957), et dans La Route joyeuse (1956), film réalisé en France par Gene Kelly, dont Cassel demeurera un grand admirateur.
Au théâtre, il interprète Marivaux et Musset au T.N.P. Remarqué par le réalisateur Philippe de Broca (alors qu'il interprète La Prétentaine, de Jacques Deval), il se révèle enfin en 1960 dans Les Jeux de l'amour, version moderne du théâtre du xviiie siècle : au côté de Geneviève Cluny, il forme un couple digne des comédies loufoques à l'américaine, authentique amoureux de Peynet tentant de s'affranchir de la tutelle de son créateur. C'est la victoire d'une équipe artistique : réalisateur, décorateur et compositeur (Georges Delerue).
De 1961 à 1964, Jean-Pierre Cassel va peaufiner un personnage proche de Walter Mitty (héros rêveur, créé par l'écrivain James Thurber, et interprété à l'écran par l'acteur Danny Kaye) dans les films suivants de De Broca − Le Farceur, L'Amant de cinq jours, Un monsieur de compagnie −, toujours avec une pointe de cynisme, une décontraction et un sens assez rare du tempo de la comédie.
Les grands réalisateurs s'intéressent alors à cet acteur aux multiples dons, et toujours discret. Jean Renoir l'engage dans Le Caporal épinglé (1962), Abel Gance l'imagine en mousquetaire dans la fantaisie Cyrano et D'Artagnan (1963), et René Clair le distribue dans Les Fêtes galantes (1965), sans oublier une incursion dans Le Candide (1961), revu par Norbert Carbonnaux.
Cassel amorce alors une carrière internationale, en Angleterre, dans Ces Merveilleux Fous volants dans leurs drôles de machines (1965) de Ken Annakin, et Ah, Dieu, que la guerre est jolie ! (1969), tiré d'une pièce à succès et réalisé par Richard Attenborough.
À la fin des années 1960, il a l'opportunité de déployer sa fantaisie dans L'Ours et la poupée de Michel Deville (1969), où il est en totale osmose avec Brigitte Bardot. Dans les années 1970, il endosse le costume du parfait bourgeois tel que Chabrol l'imagine, dans La Rupture (1970), Folies bourgeoises (1976). Il retrouvera, bien plus tard, l'univers du metteur en scène dans La Cérémonie (1995). Luis Buñuel l'invite dans Le Charme discret de la bourgeoisie (1972), et Michel Deville lui offre un contre-emploi dans Le Mouton enragé (1974), tout comme Jean-Pierre Melville dans L'Armée des ombres (1969).
Apparemment « boulimique », Jean-Pierre Cassel alterne aussi théâtre et télévision, avec, sur scène, des apparitions remarquées dans La Puce à l'oreille, Deux sur la balançoire ainsi que dans les troupes de la décentralisation – chez Roger Planchon notamment ; à la télévision, au temps des « dramatiques », il triomphe dans Marivaux, Musset et Beaumarchais (Le Mariage de Figaro).
Si, par la suite, ses apparitions de « jeune premier » se font plus rares à l'écran, il devient ce que les Anglo-Saxons appellent un character people − un acteur de composition capable de transcender la moindre apparition, ainsi dans La Truite de Joseph Losey (1982), ou encore dans un personnage de couturier du Prêt-à-porter de Robert Altman (1994). Mais c'est en réalité la scène qui lui permet de mettre en valeur ce que le cinéma n'a su qu'esquisser : parmi les points forts[...]
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Écrit par
- André-Charles COHEN : critique de cinéma, traducteur
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