RENOIR JEAN
« S'unir au mouvement du monde »
Dans le même temps, le propos de Renoir s'élargit à une vision cosmique qui est aussi sagesse universelle du plaisir. Le Fleuve, son premier film en couleurs, tourné en Inde d'après un roman de Rumer Godden, prend en compte le mouvement inéluctable de la nature et s'ouvre aux philosophies orientales. L'opposition entre l'ordre apollinien et le dionysiaque, inspirée aussi bien de la mythologie grecque que de Nietzsche, était déjà présente dans Boudu sauvé des eaux. Elle devient le moteur du Déjeuner sur l'herbe (1959), opposant la science rationnelle du biologiste qui veut imposer à l'Europe la fécondation artificielle au bouleversement des sens qui opérera sur lui grâce aux formes épanouies de Nénette (Catherine Rouvel). Les rapports du corps et de l'esprit, comme l'étouffement des principes vitaux par une morale puritaine sont de nouveau au cœur du Testament du docteur Cordelier, inspiré de l'opposition entre le docteur Jekyll et M. Hyde, imaginée par Robert Louis Stevenson. La « théorie du bouchon » se retrouve dans l'œuvre ultime de Renoir, éloge de la paresse et de la tolérance comme d'un progrès mis au service de la vie, et qui, bien loin d'impliquer une quelconque démission du politique devant la fatalité du destin, exprimerait seulement la volonté de « s'unir au mouvement du monde ».
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Écrit par
- Joël MAGNY
: critique et historien de cinéma, chargé de cours à l'université de Paris-VIII, directeur de collection aux
Cahiers du cinéma
Classification
Médias
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