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RHYS JEAN (1890-1979)

Née à Roseau (Dominique), de mère créole et d'un père médecin anglais, Ella Gwendolen Rees Williams est devenue Jean Rhys après avoir utilisé plusieurs pseudonymes. Comme la plupart des écrivains antillais, elle a passé la majeure partie de sa vie à l'étranger. Elle vécut dans l'île — alors colonie anglaise — jusqu'à l'âge de seize ans. En 1907 elle passa un trimestre à la Perse School de Cambridge avant de s'inscrire à la Royal Academy of Dramatic Arts (R.A.D.A.). En 1908, elle quittait l'Académie et s'engageait comme chorus girl dans une comédie musicale intitulée Our Miss Gibbs. Son œuvre de romancière a été fortement influencée par ces années passées comme figurante dans le monde artificiel du spectacle. Elle se rendit après la Première Guerre mondiale en Hollande où elle épousa Jean Lenglet, d'origine française et hollandaise, avec qui elle mena pendant dix ans une vie errante surtout à Paris, Vienne et Budapest.

Son premier ouvrage, The Left Bank (1927) est un recueil de nouvelles ou plutôt, comme indique la jaquette de l'époque, des « esquisses et études du Paris bohème d'aujourd'hui ». Une partie de ces nouvelles — Jean Rhys a refusé de les laisser reparaître intégralement — a été traduite dans Rive gauche (Paris, 1981) et dans Les tigres sont plus beaux à voir (1969). Elle écrivit son premier roman, Postures, en 1928, à Amsterdam, réédité en 1969 sous le titre Quartet qui fut adapté pour le cinéma (Quatuor). Ce roman se déroule dans le Paris des années vingt. Trois autres romans suivirent jusqu'à la Seconde Guerre mondiale : After Leaving Mr. Makenzie (1930), Voyage in the Dark (1934) et Good Morning, Midnight (1939). Elle poursuit son long voyage au bout de la solitude et de l'échec. Elle écrit beaucoup à Paris car elle déteste Londres et l'Angleterre. Son roman After Leaving Mr. Mackenzie, commencé à Paris, est terminé à Londres à l'époque de son divorce (1932) et de son remariage avec Leslie Tilden Smith. En 1934, elle exploite ses cahiers d'écolière pour écrire son troisième roman, Voyage in the Dark, et à Paris, en 1938, elle écrit très rapidement Good Morning, Midnight, publié en 1939. Puis c'est le silence, la guerre, la mort de son deuxième mari en 1947. Elle épouse Max Hamer et s'installe à Cheriton FiztPaine dans le Devonshire où elle passe le reste de son existence. Ses cinq livres eux aussi deviennent introuvables en librairie jusqu'en 1958. On retrouve sa trace après enquête effectuée au sujet d'une adaptation radiophonique par la B.B.C. de Bonjour, minuit. Sept ans après — son mari meurt en 1964 —, elle publie un nouveau roman, Wide Sargasso Sea (1966) dont l'action se situe vers 1830 en Jamaïque et en Dominique. Ce retour aux sources est significatif. Elle obtient le W. H. Smith Literary Award et un prix de la Société royale de littérature. Jean Rhys est faite Companion of the British Empire pour services rendus à la littérature. Elle meurt le 14 mai 1979. Quelques-unes de ses nouvelles inédites avaient été réunies sous le titre Sleep it off Lady (1976). Dans tous ses récits on retrouve ses héroïnes lucides, sensibles, apathiques, vulnérables, perdues, sans aucune protection, dans un monde hostile où dominent les hommes. Les femmes sont des victimes, des opprimées qui souffrent sans jamais pouvoir ni se défendre ni déterminer avec précision leur identité.

— Oruno D. LARA

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Écrit par

  • : professeur d'histoire, directeur du Centre de recherches Caraïbes-Amériques

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