BAILLY JEAN SYLVAIN (1736-1793)
Un des plus grands astronomes du xviiie siècle, Bailly découvre les satellites de Jupiter et écrit une monumentale Histoire de l'astronomie. Membre de l'Académie des sciences en 1763, de l'Académie française en 1783, de l'Académie des inscriptions en 1784, il est choyé dans les salons de l'aristocratie et à la Cour ; il habite d'ailleurs à l'étage supérieur du Louvre où il entasse ses instruments d'astronomie. Il voue un véritable culte à Franklin, au savant et aussi à l'homme politique, ce qui, peut-être, influencera sa carrière de révolutionnaire. En 1789, il rédige le cahier de doléances et devient secrétaire de l'assemblée électorale de son district de Paris. Élu au premier tour, premier des députés de Paris, il siège aux États généraux, en qualité de doyen des communes, et il est choisi comme président par le tiers état. Il préside la séance du Jeu de Paume le 20 juin et il est classé parmi les « démocrates ». Après la prise de la Bastille, élu maire de Paris, il reçoit Louis XVI à l'Hôtel de Ville et lui présente la cocarde tricolore.
Cet homme de cabinet se trouve mal à l'aise devant les revendications populaires, économiques autant que politiques ; il se montre malhabile à distinguer les vrais révolutionnaires des éléments douteux et provocateurs qui s'y mêlent incontestablement, mais auxquels il veut attribuer toute agitation. Ses réactions imprécises et sporadiques ne peuvent enrayer un désordre croissant qui lui fait horreur. Face aux troubles nés de la crise des subsistances, il ne réussit pas à instaurer une politique alimentaire cohérente. Ainsi, en quelques mois, le héros du serment du Jeu de Paume est devenu la bête noire des meneurs et des journalistes patriotes, notamment de Marat. Rien d'étonnant si le maire de Paris en vient vite à se montrer partisan de mesures répressives ; dès octobre 1789, il avait été, avec La Fayette, un des promoteurs du vote de la loi martiale ; le 17 juillet 1791, il s'empresse d'obéir aux ordres de l'Assemblée (qu'il a sollicités) et applique cette loi martiale en faisant tirer sur les pétitionnaires du Champ-de-Mars, qui étaient venus réclamer la déchéance de Louis XVI. Haï désormais de toute la gauche, impopulaire au plus haut point parmi les sans-culottes qui raillent cet intellectuel fourvoyé, tenu pour responsable de la « terreur tricolore » qui suivra la fusillade du Champ-de-Mars, Bailly est un homme politique fini, et il le sait. Dès le début de la Législative, il donne sa démission de maire, quitte Paris et se retire à Nantes. Lors de l'insurrection fédéraliste de 1793, il se réfugie chez Laplace à Melun. Arrêté, transféré à Paris, condamné à mort, il est exécuté en expiation du « crime du 17 juillet », le 21 brumaire an II (12 nov. 1793). Il fait preuve, devant la mort, d'un sang-froid et d'une sérénité qui avaient manqué à l'homme politique mais qui honorent en lui le grand homme de science.
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Écrit par
- Roger DUFRAISSE : agrégé de l'Université, maître assistant à l'université de Caen
Classification
Média