EMPEREUR JEAN-YVES (1952- )
Archéologue helléniste qui s'est spécialisé dans les fouilles subaquatiques auprès des précurseurs français André Tchernia et Patrice Pomey, Jean-Yves Empereur s'est fait connaître du grand public lors des fouilles du phare d'Alexandrie. On se souvient notamment des images montrant le face-à-face entre un plongeur sous-marin et un sphinx pharaonique.
Né au Mans en 1952, Jean-Yves Empereur acquiert des compétences scientifiques au cours d'études en archéologie (doctorat en 1977), en philologie et en histoire à la Sorbonne à Paris, qui aboutissent à une agrégation de lettres classiques (1975), après une maîtrise de grec classique. Il mène de front une formation sur le terrain, et son originalité sera de choisir la fouille sous-marine. Sur l'épave de la madrague de Giens dès 1969, puis à Thasos en Grèce et à Amathonte à Chypre, il se familiarise avec les techniques les plus rigoureuses de l'exploration et de l'exploitation scientifique du terrain ; il découvre également un matériel longtemps méprisé, les amphores à vin et à huile, le meilleur marqueur du commerce antique. En 1978, il est reçu membre de l'École française d'Athènes, dont il devient secrétaire général (1982-1990) et avec laquelle il organise les premières fouilles de ports antiques.
Jean-Yves Empereur se démarque aussi par le choix d'un terrain de fouilles très porteur, tant par le potentiel de découvertes qu'il recèle que par l'attrait qu'il exerce : ce sera Alexandrie. Il avait employé ses loisirs de coopérant militaire en Égypte, de 1976 à 1978, à chercher des restes d'amphores antiques. Devenu directeur de recherche au C.N.R.S., cet helléniste passionné par les contacts entre les civilisations va se donner pour mission d'étudier la ville qu'Alexandre le Grand avait fondée en 331 av. J.-C., à la suite du conseil donné en rêve, nous dit Plutarque, par Homère lui-même. Le poète signalait dans l'Odyssée une île où faire escale, Pharos, dont le nom sera connu de tous les marins.
Alexandrie est actuellement la deuxième ville d'Égypte et le premier port du pays, après avoir connu des vicissitudes nombreuses. Située sur une étroite langue de dunes, entre le lac Mariout au Sud qui la reliait au Nil, et la Méditerranée, elle devient la capitale des Ptolémées. La ville accueille en quelques années des Macédoniens, des Grecs, des Juifs qui s'engagent dans l'armée, des marins de toutes origines, mais aussi des membres du clergé égyptien. Tous font d'elle la plus grande cité de la Méditerranée, avant que Rome la supplante. Pillée par la reine de Palmyre, Zénobie (269 apr. J.-C.), puis par les Perses Sassanides (617-628 apr. J.-C.), elle connaît ensuite le déclin. Conquise par les Musulmans (642), l'habitat se réduit sous les Mamelouks à l'isthme entre Pharos et la ville antique. La reconquête du continent se fera à partir du milieu du xixe siècle, sous l'impulsion du fondateur de l'Égypte moderne, Méhémet-Ali, puis des Européens qui y développent le commerce du coton.
Mouvements de population, tremblements de terre, subsidence de la plaque africaine qui a bouleversé la circulation de l'eau, réutilisation de restes antérieurs par les générations nouvelles – tout, y compris l'activité des promoteurs immobiliers, contribue à faire d'Alexandrie un champ archéologique extrêmement complexe. Au rythme des fouilles de sauvetage accomplies, Jean-Yves Empereur a tenté de reconstituer la topographie de la ville antique.
Le phare était pour les Anciens une des sept merveilles du monde. Il avait été décrit maintes fois, jusqu'à sa destruction par le séisme de 1303. Il représente d'abord une prouesse technique : les trois étages de la tour atteignaient 135 mètres de hauteur ; ils étaient munis d'une rampe intérieure permettant à des chars[...]
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Écrit par
- Olivier PICARD : professeur émérite à la Sorbonne, membre de l'Institut
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