JEANNE D'ARC (1412-1431)
Les procès
Jeanne échoua dans une tentative d'évasion du château de Beaulieu-en-Vermandois, elle se jeta du haut d'une tour, ce qui lui fut reproché à son procès comme une tentative de suicide. Dès le 26 mai, l'Université de Paris avait réclamé qu'elle fût jugée comme hérétique par le tribunal de l' Inquisition. Ce corps, représentant suprême en France de la culture et des préjugés savants et de la collaboration avec les Bourguignons et les Anglais, s'avérait être le principal ennemi de Jeanne. Les Anglais, qui voulaient la condamnation de Jeanne, l'achetèrent à Jean de Luxembourg, mais la remirent à la justice d'Église, tout en déclarant qu'ils la reprendraient si elle n'était pas déclarée hérétique. Un tribunal ecclésiastique fut constitué, par Pierre Cauchon, évêque de Beauvais, diocèse sur le territoire duquel Jeanne avait été prise ; son diocèse étant aux mains des Français, cet universitaire parisien, devenu une créature des Anglais, était replié à Rouen. Depuis longtemps gagné aux Bourguignons, il était l'un des rédacteurs de l'ordonnance « progressiste » de 1413, dite ordonnance « cabochienne ». Il s'adjoignit, malgré les réticences de celui-ci, un dominicain, frère Jean le Maître, vicaire de l'inquisiteur de France à Rouen. Ce furent les deux seuls juges de Jeanne, entourés d'un certain nombre de conseillers et d'assesseurs à titre consultatif.
Le procès de Jeanne fut donc un procès d'« inquisition en matière de foi ». On lui reprochait le port de vêtements d'homme, qui tombait sous le coup d'une interdiction canonique, sa tentative de suicide, ses visions considérées comme une imposture et un signe de sorcellerie, son refus de soumission à l'Église militante, et divers griefs mineurs. Le procès s'ouvrit à Rouen le 9 janvier 1431. Malgré quelques entorses aux règlements ou à la tradition, il est conforme à la légalité inquisitoriale, les juges se montrant soucieux de se mettre à l'abri de cas d'annulation. La partialité se manifestera surtout dans la façon de conduire les interrogatoires et d'abuser de l'ignorance de Jeanne. Des déclarations de celle-ci on tire douze articles soumis à l'Université de Paris qui, le 14 mai, en assemblée solennelle, ratifie les conclusions des facultés de théologie et de droit. Les théologiens ont déclaré Jeanne idolâtre, invocatrice de démons, schismatique et apostate. Les canonistes l'ont dénoncée comme menteuse, devineresse, très suspecte d'hérésie, schismatique et apostate. Ou elle abjurera publiquement ses erreurs, ou elle sera abandonnée au bras séculier. Dans un moment de faiblesse, Jeanne, qui a résisté aux menaces de torture, « abjure » le 24 mai au cimetière de Saint-Ouen. Elle se ressaisit bientôt et, en signe de fidélité envers ses voix et Dieu, elle reprend le 27 mai ses habits d'homme. Un nouveau procès est expédié et, le 30 mai 1431, Jeanne hérétique et relapse, est brûlée sur le bûcher sur la place du Vieux-Marché de Rouen.
En 1437, la troisième prophétie de Jeanne s'était accomplie : les troupes de Charles VII avaient repris Paris. Le 10 novembre 1449, Charles VII entra à Rouen et, le 15 février 1450, il fit procéder à une enquête sur la façon dont s'était déroulé le procès de Jeanne. Cette enquête n'eut pas de suite. En 1452, pour plaire à la cour française, le cardinal d' Estouteville, légat pontifical, fit rouvrir l'enquête sans plus de résultat immédiat. En 1455, à la demande de la mère de Jeanne, débuta un nouveau procès d'inquisition, où le nouveau grand inquisiteur de France, le dominicain Jean Bréhal, se dépensa en faveur de la mémoire de Jeanne. Le 7 juillet 1456, dans la grande salle du palais archiépiscopal de Rouen, les commissaires pontificaux, sous la présidence de Jean Juvénal des Ursins, archevêque[...]
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Écrit par
- Jacques LE GOFF : directeur d'études à l'École pratique des hautes études
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Médias
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