SAVONAROLE JÉRÔME (1452-1498)
La réforme
Pour réformer l'Église et la société, Savonarole veut d'abord réformer les Florentins, le « peuple élu » qui sera l'instrument de Dieu ; son plan a été exposé dès 1489 et méthodiquement poursuivi pendant huit ans.
Fondamentalement, la réforme est morale et religieuse. Dès 1495, Savonarole a répudié le compromis entre la mystique chrétienne et le platonisme païen. Il dénonce la philosophie de ses amis humanistes comme inutile, fallacieuse, voire dangereuse pour la foi. Il s'en prend au luxe corrupteur, ce qui le dresse contre les magnats aussi bien que contre les partisans des Médicis, contre les marchands aussi bien que contre les humanistes. L'art religieux lui-même est accusé de faire « oublier Dieu ». Savonarole se situe dans la lignée de tant de grands réformateurs canonisés, de saint Bernard de Clairvaux en particulier.
La logique de sa propre violence verbale le contraint à la surenchère. Le 7 février 1497, au cours de la fête pénitentielle qu'il a substituée à l'ancien carnaval, dans un gigantesque bûcher à l'ordonnance symbolique, les Florentines sacrifient toilettes et bijoux, cependant que périssent dans les flammes, parfois de la main même de leurs auteurs, tableaux « impudiques » et livres libertins. Les cantiques remplacent la poésie mythologique et l'art n'est plus qu'œuvre de dévotion. En outre, les Florentins tolèrent que la jeunesse exaltée se constitue en police des mœurs et que soit pratiquée la délation systématique.
Pour parvenir à ses fins, Savonarole doit intervenir dans les affaires de la cité. Il donne à Laurent de Médicis, puis à son fils Pierre, des conseils qui se veulent des ordres de Dieu. Il accueille le roi de France Charles VIII (entré à Florence le 17 nov. 1494) comme l'envoyé de Dieu venu remettre les Italiens dans le droit chemin. Puis il profite du départ du Médicis et de l'échec de l'entreprise française pour instaurer à Florence une république de la vertu dont le rayonnement moral doit aider à la réforme universelle. En attendant, on ouvre à quelque trois mille familles un nouveau Grand Conseil, on réforme le crédit en faveur des classes modestes et l'on annonce, après la tyrannie des Médicis, plus de justice et un plus grand respect des institutions démocratiques. Savonarole s'établit comme la conscience officielle de Florence, et son audience accrue l'encourage à toutes les hardiesses.
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Écrit par
- Jean FAVIER : membre de l'Institut, directeur général des Archives de France
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