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JÉSUS ou JÉSUS-CHRIST

Les discours sur le Christ

Le mot « christologie » francise le grec logos pour le faire désigner la parole ou, mieux, le « discours », qui porte, en ce cas, sur christos. Un christos qui fait penser d'emblée à celui que les chrétiens appellent « le Christ » et dont ils tirent justement leur nom.

Cette sommaire explication de mots peut suffire à poser au moins deux problèmes dont le traitement sérieux entraînera beaucoup plus loin.

Le terme « christos » n'est lui-même que le mot grec qui traduit l'hébreu māšīah. L'un comme l'autre renvoient à l'action d'oindre, à une onction (d'huile sainte) par laquelle un chef (charismatique) se trouve rituellement investi pour la conduite et le « salut » d'un peuple. Si l'histoire, comme l'étymologie, fonde cette signification élémentaire commune aux deux termes francisés « christ » et «  messie », est-ce à dire pour autant que l'équivalence en soit acquise dans les mentalités courantes ?

Pour être habituelle dans notre horizon culturel et religieux, une autre équivalence dissimule en revanche un plus profond problème : dire « [le] Christ » est-ce nécessairement dire « Jésus-Christ » ? Cela ne va pas de soi. Il n'est pas besoin en effet d'être spécialiste en histoire des religions et des sociétés pour admettre que la question du messianisme est bien loin de se réduire à celle de Jésus.

Bref :

– Quel est le sens général du terme « christ-messie » ? Pourquoi et pour qui y a-t-on recouru dans le passé ? Quelle signification est-il encore susceptible de revêtir pour nous aujourd'hui ?

– En quel sens particulier a-t-il pu et peut-il toujours être appliqué non seulement spécialement mais préférentiellement, voire exclusivement, à Jésus de Nazareth ?

Tels sont les deux problèmes qui donnent déjà légitimité minimale à un « discours » sur « christ », à cette réflexion que désigne le mot « christologie ». Si peu familier soit-il à beaucoup, on peut voir que l'interrogation sur « le messie », à laquelle il apparaît maintenant renvoyer, déborde notablement le champ de la particularité chrétienne où il a, de fait, préférentiellement cours, pour rejoindre des interrogations et des intérêts humains beaucoup plus larges. Ceux-ci se vérifient d'abord dans le champ religieux. Non seulement le judaïsme et l'islam – ce qui fait déjà beaucoup –, mais nombre d'autres courants religieux, y compris récents, font en effet expressément place à un messianisme. Cela oblige déjà à situer au niveau plus général des grandes religions du monde une interrogation dont le christianisme n'a plus, dès lors, le monopole.

On peut cependant aller plus loin encore à partir d'un trait inhérent à la notion même de Messie : son rapport à des attentes et des aspirations humaines qu'il est supposé venir exaucer. Ne dit-on pas de telle personne, ou même de tel événement dont on espère beaucoup (sinon tout ! ) : « Il est attendu... », ou bien : « On l'a accueilli... comme le messie » ? Ici n'est-ce pas tout simplement l'homme qui s'exprime, religieux ou non, l'homme comme tel lorsqu'il s'interroge sur ce qui peut donner sens à son existence comme individu, comme peuple, ou même comme espèce ? Et y a-t-il ou non un répondant effectif au « principe espérance » (Bloch) qui court à travers toute l'histoire, qu'il s'exprime ou non en terme de « messianisme » ? À ce stade, on a bel et bien rejoint, après le « singulier chrétien » et le « général religieux », l'universel humain. Quoi qu'il en soit des deux autres, il est clair que c'est bien à ce troisième niveau qu'il conviendra de décider de l'intérêt et de l'importance d'une « christologie », telle du moins que nous sommes maintenant[...]

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Écrit par

  • : théologien, docteur en théologie, doyen de la faculté de théologie de l'Institut catholique de Paris
  • : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section, sciences religieuses)
  • : agrégé de l'université, docteur ès lettres, directeur de recherche émérite au C.N.R.S.

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Adoration des Mages, P. P. Rubens - crédits : Musée des Beaux-Arts, Lyon

Adoration des Mages, P. P. Rubens

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-200 à 200 apr. J.-C. La loi romaine

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